L'ONG Human Rights Watch (HRW) a dénoncé vendredi " la surveillance lourde et quasi-constante" imposée par les forces de sécurité marocaines à la militante sahraouie, Sultana Khaya, depuis plus de trois mois. " Sans fournir aucune justification, lesdites forces ont empêché plusieurs personnes, dont des parents de l'activiste, de lui rendre visite", s'indigne l'ONG, basée à Washington, dans un communiqué. "La surveillance de cette activiste, Sultana Khaya, et les violations de son droit à se réunir librement avec autrui dans son domicile de Boujdour, au Sahara occidental, sont emblématiques de l'intolérance du gouvernement marocain vis-à-vis des appels à l'autodétermination qui contrecarrent la revendication de ce territoire par le royaume", souligne HRW. Et rappelle que " Khaya est connue localement pour son opposition véhémente au contrôle du Maroc sur le Sahara occidental". "Les autorités marocaines goûtent sans doute peu les opinions indépendantistes de Sultana Khaya, ainsi que sa manière fougueuse de les afficher ", a déclaré Eric Goldstein, directeur Moyen-Orient et Afrique du Nord par intérim à Human Rights Watch. "Il n'en reste pas moins que s'exprimer pacifiquement est son droit, et que rien ne justifie de barrer l'entrée de son domicile sans fondement légal", relève Goldstein, cité dans le communiqué Et d'ajouter: "la surveillance policière musclée de la maison de Sultana Khaya l'illustre bien : le Maroc est déterminé à mettre sous pression, y compris psychologiquement, tout opposant à la souveraineté qu'il revendique sur le Sahara occidental". L'ONG indique que la militante sahraouie est revenue au domicile familial à Boujdour le 19 novembre 2020, après un voyage en Espagne. Alors qu'"elle était absente ce soir-là, des membres des forces de sécurité marocaines ont effectué une descente chez elle. Pendant le raid, ils ont frappé sa mère de 84 ans à la tête. Depuis ce jour, les forces de l'ordre n'ont plus quitté les alentours de son domicile. HRW a consulté plusieurs vidéos, filmées à diverses dates depuis le 19 novembre, montrant des membres des forces de sécurité devant le domicile de Khaya, tandis qu'elle scande des slogans pro-indépendance depuis une fenêtre de sa maison. Depuis le 19 novembre, Khaya a quitté son domicile moins d'une dizaine de fois, marchant sur quelques mètres tout en filmant les membres des forces de sécurité à l'aide de son téléphone. Khaya ne s'est aventurée plus loin qu'une seule fois depuis le 19 novembre, a-t-elle déclaré à l'ONG. Un jour vers fin décembre, elle dit s'être éloignée environ 150 mètres de sa porte d'entrée, jusqu'à ce que des membres des forces de l'ordre se regroupent près d'elle, se sentant menacée elle est retournée à la maison. Le 13 février, alors qu'elle filmait la police d'une fenêtre ouverte, Khaya a été frappée au visage par une pierre que, selon elle, un membre des forces de sécurité avait lancée depuis la rue. Le militant sahraoui qui vit à Boujdour, Hassanna Duihi, a affirmé dans une déclaration à HRW que depuis décembre, il a tenté quatre fois de rendre visite à Khaya. Les deux premières fois, des membres des forces de sécurité en uniforme l'ont repoussé sans fournir d'autre raison que "les instructions" qu'ils avaient reçues. "Les autorités marocaines restreignent fortement, depuis longtemps, toutes les manifestations d'opposition à leur administration du Sahara occidental. Elles empêchent les rassemblements de soutien à l'autodétermination sahraouie et soumettent les militants indépendantistes à des violences dans la rue ou en garde à vue, les emprisonnent, les condamnent au terme de procès entachés d'irrégularités ou d'actes de torture", s'indigne encore l'ONG. Elle rappelle que "les autorités marocaines ont également refusé l'entrée au Sahara occidental à de nombreux visiteurs étrangers ces dernières années, notamment des journalistes et militants des droits humains". En 1991, le Maroc et le Front Polisario ont accepté un cessez-le-feu négocié par l'ONU afin de préparer un référendum d'autodétermination. Mais ce scrutin n'a jamais eu lieu, le Maroc refuse d'organiser tout référendum dont l'un des choix serait l'indépendance.