Les élections législatives du 12 juin prochain seront marquées par un changement radical de l'opération électorale avec l'adoption du mode de scrutin de liste ouverte à la représentation proportionnelle qui est à même de consacrer le choix de l'électeur et de barrer la route à l'argent sale. L'article 191 de la loi organique relative au régime électoral dispose que "l'Assemblée populaire nationale est élue pour un mandat de cinq (5) ans au scrutin de liste ouverte à la représentation proportionnelle avec vote préférentiel, sans panachage. La liste des candidats doit comprendre un nombre de candidats supérieur de trois (3) au nombre de sièges à pourvoir dans les circonscriptions électorales dont le nombre de sièges est impair et de deux (2) dans les circonscriptions électorales dont le nombre de sièges à pourvoir est pair". "Lorsque le tiers donne un chiffre décimal, il est arrondi au chiffre supérieur", selon le même article. Le mode de scrutin proportionnel, en vigueur dans de nombreux pays, permet à l'électeur de voter pour une liste de candidats mais aussi pour un ou plusieurs candidats de cette liste. Cependant, l'électeur ne peut voter pour plus d'une liste ni pour une liste donnée et en même temps des candidats d'une autre liste ni pour des candidats de différentes listes. Dans ces cas, le bulletin est nul. Ce mode de scrutin donne lieu à une répartition des sièges proportionnelle au nombre de voix obtenues par chaque liste avec application de la règle du plus fort reste. Chaque liste obtient autant de sièges qu'elle a recueilli de fois le quotient électoral. En cas d'égalité du taux de suffrages entre deux listes ou d'égalité de voix entre deux candidats, un tirage au sort détermine le vainqueur. En tout état de cause, avec le scrutin de liste ouverte, ce sont les électeurs qui déterminent qui remportera les sièges en votant en faveur des candidats de la liste. Il s'oppose en cela au scrutin à liste bloquée ou liste fermée dans lequel les électeurs ne peuvent pas modifier la composition et l'ordre. Pour le professeur de sciences politiques, Ali Mohamed Rebidj, le mode de scrutin de liste ouverte à la représentation proportionnelle est "le seul moyen à même de barrer la route à de nombreuses pratiques qui avaient cours par le passé". Ce mode de scrutin était "une revendication de tous les partis politiques car il garantit une quasi égalité entre les candidats en laissant à l'électeur le soin de choisir sur une même liste le ou les candidats qui lui conviennent sans lui imposer un ordre préétabli", a-t-il souligné. Il a ajouté que ce nouveau mode électoral "accorde une chance à toutes les compétences, notamment les jeunes inscrits sur les listes électorales", soulignant que "la liste fermée permettait auparavant aux têtes de liste de remporter des sièges au sein des Assemblées élues, alors que des candidats plus compétents se trouvaient exclus en raison de leur classement en bas de liste". Parmi les avantages du scrutin proportionnel, M. Rebih a cité aussi "la représentation de toutes les franges de la société, d'autant que la loi électorale a imposé le principe de parité homme-femme et réservé un quota aux jeunes âgés de moins de quarante ans et ayant un niveau universitaire". Et d'ajouter: "tous ces facteurs réunis sont à même d'amener les partis à changer les voies classiques qui encourageaient l'argent sale". Cependant, ce nouveau mode pourrait provoquer des dissensions au sein des partis politiques, vu que "les candidats inscrits sur une même liste peuvent envisager des alliances et faire leur propre campagne, sous peine d'exclure d'autres noms inscrits sur la même liste", a-t-il fait savoir. Le rapporteur de la Commission nationale chargée de l'élaboration du projet de révision de la loi organique portant régime électoral, Walid Laggoune avait déclaré auparavant que l'une des réformes fondamentales dans le projet de loi a trait au changement du mode de scrutin, ajoutant que «l'électeur est libre de choisir le candidat qu'il préfère». Avec cette modification, "les effets négatifs de l'ancienne loi s'estompent. On ne peut plus acheter ni des voix, ni des places", a-t-il soutenu. Il a estimé, dans ce contexte, que l'ancien mode de scrutin avec des listes fermées "a eu des conséquences néfastes" et "n'a pas permis l'émergence des élites qu'elles soient locales ou nationales". Pour sa part, le président du Conseil constitutionnel, Kamel Fenniche a dit qu'il s'agit "d'une révolution, de par le changement radical apporté à l'opération électorale, notamment en matière de mode de scrutin proportionnel à listes ouvertes", qui concrétise, a-t-il ajouté, "le véritable sens de la démocratie". Il a mis en avant, en outre, l'objectif de "rétablir la confiance des citoyens en les gouvernants, à travers l'encouragement d'une plus grande adhésion au processus électoral" et celui de "mettre fin aux pratiques électorales du passé". De son côté, le ministre de la Communication, Porte-parole du gouvernement, Ammar Belhimer a estimé que le nouveau mode de scrutin constitue "un tournant et un changement radical par la voie pacifique et institutionnelle, dans lequel ni l'argent, ni les excroissances du système ne doivent orienter le choix de l'électeur ou le falsifier".