Des milliers d'Algériens ont marché, samedi à Sétif, pour la mémoire et la fidélité aux 45.000 martyrs tombés le 8 mai 1945 sous les balles de l'armée coloniale française à Sétif, Guelma et Kherrata, et ce, à l'occasion des célébrations officielles de la journée nationale de la Mémoire et le 76e anniversaire de ces évènements tragiques. La marche populaire qui s'est ébranlée à partir de la mosquée Abou Dhar el Ghifari (ex mosquée de la gare ferroviaire), a été rehaussée par la présence du secrétaire général du ministère des Moudjahidine et des Ayants droit, Laïd Rebika, des autorités locales civiles et militaires, du Conseiller du président de la République, chargé des Archives et de la Mémoire nationale, Abdelmadjid Chikhi, du secrétaire général de l'Organisation nationale des enfants de moudjahidine (ONEM), Khalfa Mbarek, du président de l'association 8 mai 1945, Abdelmadjid Slakedji, de la famille révolutionnaire et d'une foule immense de citoyens de différentes franges. Ces images ont rappelé aux milliers d'Algériens le souvenir des marches pacifiques durant lesquelles un peuple désarmé avait revendiqué, 76 ans avant au même endroit et au même moment, son droit à l'indépendance et à la liberté. Les scouts marchaient en tête portant une gerbe de fleurs en gage de sincérité au caractère pacifique des marches qui se sont transformées en évènements sanglants et en véritable tragédie humaine. Empruntant le même chemin que Saâl Bouzid et ses compagnons, comme Aissa Cheraga, Lakhdar Taarabit, Omar Zitouni et bien d'autres, ils étaient nombreux, en ce mardi noir, à vouloir prouver au monde entier que les massacres perpétrés par la machine coloniale, un 8 mai 1945, contre un peuple sans défense "resteront gravés à jamais dans la mémoire collective, comme une marque honteuse sur le fronton des puissances coloniales et l'un des plus ignobles massacres de l'histoire contemporaine". Des carrés se sont formés, dirigés par les Scouts musulmans algériens (SMA) qui portaient le drapeau national et chantaient des chants patriotiques et d'autres des représentants de nombreux corps tels la Gendarmerie nationale, la Sûreté nationale, la Protection civile, dans une atmosphère imprégnée des plus hauts sentiments de gratitude et de loyauté envers les martyrs du 8 mai 1945. Le cortège a sillonné la Rue du 1er novembre 1954 pour arriver à la stèle commémorative de "Bouzid Saâl", érigé en hommage à ce héros qui fut le premier martyr tombé lors de ces événements au milieu de la Rue du 8 mai 1945 (Ex-Georges Clemenceau), à quelques mètres de la fontaine Ain El Fouara, où une gerbe de fleurs a été déposée et la Fatiha a été récitée à la mémoire des martyrs. La marche a marqué un arrêt à cet endroit, où des centaines d'écoliers ont interprété de nombreux chants patriotiques et une représentation épique sur le martyr héros Saal Bouzid a été donnée par les bourgeons des SMA. Auparavant, la délégation officielle s'est rendue au cimetière de Sidi-Saïd dans la cité Bouaroua, (au centre-ville), l'un des témoins des massacres du 8 mai 1945, où une cérémonie de recueillement sur la mémoire des Chouhada de ces douloureux événements a été organisée. Au même endroit, le journaliste Kamel Beniaiche, auteur du livre "Sétif, la fosse commune: les massacres du 8 mai 1945", a déclaré à l'APS que "l'odeur musquée des corps des victimes des massacres du 8 mai 1945 envahit cet endroit, qui demeurera un témoin de l'un des plus grands crimes contre l'humanité de l'histoire contemporaine". Et d'ajouter dans le même contexte que "le corps de Saal Bouzid, première victime de ces terribles massacres, a été jeté 3 jours après sa mort, avec 85 autres corps, dans une fosse commune du cimetière de Sidi-Saïd", selon le témoignage du feu Ammar Guemache, un habitant de la ville qui a vécu ces événements. Les festivités commémorant le 8 mai 1945, lancées jeudi à Sétif, se poursuivront avec l'organisation de plusieurs activités, à l'instar de la distribution de 3310 tenues de l'Aïd au profit des orphelins à l'école des jeunes sourds située à la cité El Maabouda dans le chef-lieu de la wilaya et l'ouverture à la Maison de la Culture, "Houari Boumediene", des travaux d'un forum national intitulé "Crimes coloniaux dans le monde, le 8 mai 1945 comme modèle". Le programme de la commémoration de cet anniversaire comprend également une visite de la délégation officielle du projet de réalisation de l'observatoire du 8 mai 1945, et l'inauguration et l'appellation de deux groupes scolaires et d'une nouvelle école d'enseignement moyen dans la cité El Hidhab à l'est de Sétif.