NEW YORK (Nations unies) - Le ministre des Affaires étrangères, M. Mourad Medelci, a soutenu à New York que l'Algérie accordait la plus grande importance aux questions de désarmement et de non-prolifération, tout en regrettant que la Conférence du désarmement "n'arrive pas à progresser". Dans son intervention, lors de la réunion de haut niveau sur la relance des travaux de la Conférence du désarmement (CD), organisée en marge de la 65e session de l'Assemblée générale de l'ONU, M. Medelci a affirmé que la CD, organe singulier de négociation en matière de désarmement, a été, depuis sa mise en place, d'un apport "indéniable" au désarmement multilatéral. Mais il a déploré que la conférence "n'arrive pas à progresser" et que cet état de fait "porte tout particulièrement atteinte aux intérêts des puissances non nucléaires", appelant les Etats membres de l'ONU à remédier à cette situation. Enumérant dans les détails les raisons du blocage de la CD, le ministre a affirmé que l'Algérie estimait que ce gel ne saurait être imputé à une défaillance de ce mécanisme institutionnel ou à son mode de prise de décision, en l'occurrence le consensus, comme d'aucuns le prétendent. Pour lui, il faut en rechercher les causes également dans "l'évolution de la problématique du désarmement et des politiques de sécurité, hors du cadre de la conférence, et dans les atermoiements des Etats quant à leur acceptation d'aborder de manière équilibrée l'ensemble des questions liées qui figurent à son ordre du jour". "L'absence de volonté politique pour la prise en charge de l'ensemble des questions à l'ordre du jour de la conférence, d'une part, et les tentatives de hiérarchiser les points du décalogue associés aux aléas des équilibres sécuritaires régionaux, d'autre part, sont à l'origine du blocage actuel : il convient d'agir dans ce sens plutôt que de menacer de condamner la conférence à la marginalisation", a-t-il insisté lors de cette réunion qui a réuni près 70 délégations dont une cinquantaine de ministres des Affaires étrangères. Par ailleurs, M. Medelci a fait valoir que l'autorité de la CD, sa crédibilité ainsi que son efficacité dépendaient de sa capacité à susciter la confiance nécessaire aux Etats en étant à l'écoute de leurs préoccupations légitimes de sécurité non diminuée pour tous et en fonction du principe selon lequel "la sécurité est une et indivisible". "La première priorité de la CD devrait être de traiter, ainsi que le stipule son mandat, du désarmement nucléaire", a insisté M. Medelci, ajoutant que la négociation d'une convention ou d'un cadre institutionnel pour l'élimination de l'arme nucléaire est la voie appropriée pour concrétiser les engagements souscrits par les Etats dotés de l'arme nucléaire en 1995, en 2000 et réitéré en 2010. Il a également relevé que la négociation, au sein de la CD, d'un traité sur l'interdiction des matières fissiles en tant que mesure de désarmement et de non-prolifération, s'inscrit elle aussi dans la perspective d'aboutir à l'élimination complète des armes nucléaires selon un échéancier explicite. Les garanties négatives revêtent, pour leur part, une importance vitale, a encore noté le ministre en précisant qu'en l'absence d'un accord multilatéral à cet effet, "on ne pourra pallier durablement l'asymétrie sécuritaire induite par le caractère discriminatoire, normalement intérimaire, du TNP et par son application sélective". "Il devrait être possible, a-t-il soutenu, de transformer en instrument multilatéral juridiquement contraignant les déclarations unilatérales des puissances nucléaires reconnaissant la légitimité de la revendication de garanties négatives de sécurité des Etats non nucléaires" (NDLR : la garantie négative de sécurité signifie le non-recours par les puissances nucléaires de l'arme nucléaire contre des pays non nucléaires). S'exprimant sur la prévention de la course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique, M. Medelci a avancé que celle-ci constituait, elle aussi, un "élément fondamental" pour la stabilité et la sécurité internationales. Le ministre a estimé que la CD devrait renforcer le régime juridique et les mesures de confiance de nature à mettre l'humanité à l'abri de la militarisation de l'espace et à réserver celui-ci aux seules utilisations pacifiques. Il a ainsi exprimé à sa conviction que cette réunion devait être "l'occasion de réitérer l'engagement de la communauté internationale en faveur d'une mise en oeuvre globale et équilibrée du décalogue et de restaurer la vocation de la CD, en tant que cadre multilatéral unique de négociation sur le désarmement". "Une session ordinaire de l'Assemblée générale ne saurait dessaisir la CD de ses prorogatives, voire se substituer à elle ou légitimer la dissociation d'un des thèmes fondamentaux relevant de son mandat", a-t-il observé. En plus de son caractère de précédent lourd de conséquence, a-t-il expliqué, "ceci remettrait en cause la globalité et l'équilibre à maintenir entre les thèmes centraux et complémentaires de la CD", ajoutant qu'il en "résulterait, inéluctablement, une mise en cause de la globalité de la démarche conduisant à l'abandon de la seule voie pouvant conduire, durablement, à l'élimination du péril nucléaire". "En revanche, la convocation de la 4e session extraordinaire de l'Assemblée générale de l'ONU sur le désarmement pourrait être issue de cette réunion de New York et qu'une telle session aura à traiter de la problématique du désarmement dans sa globalité", a-t-il souligné. M. Medelci a rappelé que l'adoption par consensus, en 2009, du programme de travail de la CD, intervenue sous la présidence algérienne avec le concours et l'engagement de tous, est "le fruit de l'esprit de compromis dont les uns et les autres ont su faire preuve". A ce propos, il a insisté sur "la nécessité de ne pas entraver la progression des négociations au sein de la CD en s'abstenant de toute action sur les plans unilatéral, bilatéral et régional qui aurait cet effet".