Vingt trois ans sont passés depuis le 5 octobre 1988 et l'Algérie cherche toujours des réformes politiques, économiques et sociales qui la feraient sortir définitivement de la phase de transition qui assez duré. Et comme au lendemain des événements d'octobre, lorsque le parlement du parti unique lançait des réformes sur mesure, la même méthode a été reprise avec les réformes auxquelles ont poussé les émeutes de janvier 2011. Lorsque le régime a voulu minimiser les événements d'octobre 88, la révolte des algériens a été alors et même après traité de divers qualificatifs. Certains l'ont qualifié de « chahuts de gamins », d'autres ont dit que ceux qui étaient sortis étaient des « parasites », d'autres encore ont prétendu qu'ils étaient fomentés par le régime, et il y a certains qui ont dit que les opposants au président Chadli ont réglé leurs comptes et fait sortir leurs résidus dans la rue. Mais lorsque les révolutions du printemps arabe ont envahi plusieurs pays et que la rumeur voulait que les vagues de protestations populaires s'étendent d'un pays à un autre à la manière des « dominos », nous avons entendu le premier ministre Ahmed Ouyahia, le secrétaire général du parti de la majorité et même le ministre des affaires étrangères Mourad Medelci répéter qu' « il n y aura pas de révolution en Algérie, parce que les algériens ont fait leur révolution en octobre 88 ». Ce qui signifie que les autorités d'hier comme celles d'aujourd'hui ont donné une mauvaise interprétation des événements, et les ont gérés en fonction de leurs intérêts, puisqu'en voulant dire que le 5 octobre 88 n'exprimait pas un rejet populaire du parti unique et du régime au pouvoir, mais une protestation populaire face à la pénurie de produits alimentaires, elles l'ont fait sans hésiter, pour preuve les réformes qui ont fait suite aux événements ont été vidées de leur substance et ont été avortées au fil des années. Le résultat est que l'Algérie n'est toujours pas sortie, 23 ans après les événements d'octobre, de la phase de transition et de la démocratie de façade. Et après avoir assuré que les émeutes de janvier 2011 n'étaient pas des revendications politiques, mais étaient contre la cherté des prix de l'huile et du sucre, le pouvoir a tenté une nouvelle fois de contourner la réalité. Tout a été dit sinon que ces événements voulaient des changements dans le pays. Mais lorsque les révolutions arabes se sont étendues, que des régimes sont tombés et que des présidents ont été déchus, les autorités ont été obligées de reconsidérer les événements du 5 octobre, 23 ans après, puisqu'elles ont déclaré à ceux qui lui demandent des réformes et un changement particulièrement de l'étranger, que les algériens se sont révoltés en 88 et n'ont pas attendu les révolutions arabes pour revendiquer des droits et des libertés. Mais les algériens étaient les premiers à se révolter pour la démocratie, comparés à leurs voisins arabes. Pourquoi l'Algérie est classée dans le domaine de la démocratie et des libertés derrière ceux qui ne se sont révoltés que récemment ? Les réformes décidées après octobre 88 auraient pu être un pas significatif vers plus de démocratie si elles n'avaient pas été contournées et avortées, parce que l'Algérie avait à l'époque un espace de liberté pour adopter les vraies réformes qu'elles voulaient, après près de 30 ans d'expérience socialiste, d'économie centralisée et de parti unique. Mais l'absence de conviction du régime de la nécessité des réformes et l'entrée du pays par la suite en conflit avec les terroristes ont fait manquer à l'Algérie l'opportunité de tirer les leçons du 5 octobre. Vingt trois ans après les événements d'octobre l'Algérie se retrouve obligée en 2011, par des pressions intérieures et extérieures, à parachever les réformes sensées avoir été décidées en 88, ce qui signifie que l'Algérie est en retard de 23 ans, et est au même niveau que les pays voisins dans le domaine des réformes politiques, après avoir été comme l'ont reconnu ses responsables à l'avant-garde des révolutions populaires.