Après dix-huit jours de grève de la faim, l'état de santé des enseignants contractuels s'est gravement détérioré. Il ne se passe pas un jour sans que plusieurs d'entre eux ne soient évacués dans un état comateux vers l'hôpital. Et tout cela se déroule sous l'œil indifférent des pouvoirs publics. Les grévistes ont eu l'appui et le soutien de différentes organisations nationales et internationales, à l'exception du ministre du secteur qui refuse non seulement une prise de contact avec eux, mais aussi avec les médiateurs. Cet état de fait a été confirmé sur le terrain mercredi dernier, lorsque des syndicalistes ont sollicité une entrevue avec M. Benbouzid pour lui demander tout simplement l'ouverture de négociations avec les grévistes. Méprisant, le ministre campe, depuis le début de cette affaire, sur sa position : pas de titularisation sans concours. Un concours pourtant dénoncé et décrié par les enseignants contractuels qui y ont pris part mardi passé. Il est inadmissible, selon eux, de recruter un enseignant sur la base d'un entretien oral de quelques minutes. « Les inspecteurs désignés pour évaluer les capacités des enseignants se sont contentés d'un bref aperçu de notre carrière », a déploré un enseignant, qui estime que ce procédé démontre que les critères de recrutement ne s'appuient pas sur la compétence mais plutôt sur d'autres aspects... « Au moment où des dizaines d'enseignants mènent un combat et une bataille pour rester en vie, le ministre tente par tous les moyens de se légitimer. Pour nous, tant que les commissions sont composées uniquement de représentants de l'administration, les concours ne seront pas crédibles », explique un gréviste. Le ministre, qui préfère gérer la situation par communiqués, a annoncé qu'une bonification sera accordée aux enseignants ayant postulé au concours national de recrutement et ayant exercé aussi bien à titre de suppléant (remplaçant) qu'à titre de contractuel (occupant un poste vacant). Selon toute vraisemblance, la préoccupation du ministre est ailleurs. Peut-on à ce point tourner le dos à un problème qui risque de prendre une tournure grave ? Comment peut-on faire semblant d'ignorer une telle situation ? Qu'attend le gouvernement pour prendre enfin une décision politique puisque le ministre du secteur essaye de s'en laver les mains ? Les enseignants contractuels sont déterminés à aller jusqu'au bout. Ils vont encore manifester dans la rue le 5 août prochain. Une fois de plus, ils vont prendre à témoin l'opinion publique. Cette décision a été prise hier par le conseil national, en concertation avec le Snapap. « Nous revendiquons la réintégration dans nos postes de travail. Est-ce un crime de demander un emploi au moment où le chef de l'Etat fustige les jeunes qui refusent de travailler dans certains secteurs ? Il existe une contradiction flagrante entre le discours politique et la réalité », regrette un enseignant. Par ailleurs, Le CCDR et le CLA ont tenu à dénoncer la répression inouïe qu'a subi le rassemblement pacifique du 30 juillet devant le ministère de l'Education nationale. « Les participants à ce sit-in, venus marquer leur solidarité, ont été pourchassés, poussés vers des ruelles, loin des regard des citoyens. Ceci est intolérable et scandaleux ! », a déclaré désappointé le responsable du CLA, qui est persuadé que les tenants de l'option répressive travaillent pour le pourrissement de la situation. Pour ce dernier, une journée de plus pour ces grévistes ne peut être qu'une journée de trop. Il faut en urgence ouvrir un dialogue responsable, qui donne comme perspectives l'intégration de ces milliers de contractuels qui ont donné des années au service de l'école algérienne. « Seul un dialogue qui ne considère pas les grévistes comme des parias peut éviter le pire. » De son côté, le CCDR fustige le pouvoir qui, « sous prétexte de l'état d'urgence, matraque sans état d'âme » les participants au sit-in de soutien aux enseignants contractuels grévistes de la faim. « Est-ce ainsi que l'on éduque nos enfants, en tabassant leurs maîtres sous leurs yeux ? Est-ce ainsi que l'on prépare la société de demain, non violente et tolérante, toute de justice et de démocratie ? », s'est interrogé M. Brerhi, qui plus loin dit comprendre pourquoi il y a eu augmentation des suicides, prolifération de la délinquance, de la consommation de drogue jusqu'au sein des écoles primaires, tant de jeunes qui ne rêvent qu'à quitter leur pays et tant de cerveaux qui le fuient. Le CCDR se réjouit du fait que plusieurs partis et syndicats autonomes se soient mobilisés pour soutenir les grévistes.