Croyez-vous que la trêve signée entre opposition et gouvernement de transition a une chance de durer ? La question n'est pas de savoir si la trêve peut durer, mais plutôt si la trêve a pu être réalisée sur terrain. L'accord de Djibouti, qui envisage cette trêve, a un soutien important de la part des opposants de la (ARS) basés à Djibouti, de celle de la communauté internationale et de celle du Premier ministre du gouvernement de transition somalien. Même le gouvernement éthiopien semble être arrivé à soutenir l'accord tout en émettant quelques réserves. Mais la plupart des forces armées qui se rangent contre le gouvernement de transition et les forces éthiopiennes ne sont pas sous le contrôle direct des opposants à Djibouti. Et le Premier ministre, Nur Hassan Hussein, n'a aucun contrôle réel sur les milices et forces armées de son propre gouvernement. Ce problème est particulièrement grave à Mogadiscio où les combats et les abus graves des droits humains se poursuivent malgré la signature de l'accord. Ce dernier, avec la trêve qu'il envisage, peut encore être une étape importante dans le processus d'une paix négocié. Mais cela ne peut arriver que si toutes les parties qui ont rejeté l'accord jusqu'à présent – y compris les Shabab (milice islamiste), d'autres groupes islamistes et les milices alliées au gouvernement de transition – acceptent le principe de son application. Ce qui sera extrêmement difficile à réaliser, mais non pas impossible. Pourquoi – à part le problème de piraterie – la communauté internationale semble-t-elle avoir oublié la Somalie ? Malheureusement, la communauté internationale ne semble pas être capable de reconnaître la gravité de la situation en Somalie. La Somalie est en crise depuis 1991 et la plupart des pays occidentaux se sont habitués à l'idée d'une Somalie perpétuellement sans gouvernement et plongée dans la guerre civile. Il s'agit là d'un manque de compréhension énorme et désastreux parce que la situation actuelle est une crise tout à fait différente et plus grave que les crises connues par le pays entre 1991 et 2006. La communauté internationale doit reconnaître ce fait et réagir d'une façon plus sérieuse. De l'autre côté, c'est également vrai que la situation sur le terrain est complexe et les actions précises qui doivent être prises par la communauté internationale pour aboutir à une solution à la crise somalienne sont difficiles à élaborer. Mais cela n'excuse pas l'approche désastreuse de certains pays, notamment les Etats-Unis, qui dans plusieurs de leurs actions ont considéré la Somalie comme un terrain de la guerre contre le terrorisme. La situation en Somalie doit être vue avant tout comme une crise humanitaire profonde et grave et non pas seulement comme une menace pour les intérêts des pays étrangers. Pensez-vous que seule le règlement du conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée pourrait pacifier la situation en Somalie ? Le règlement du conflit entre ces deux pays aiderait immensément à la résolution de la crise en Somalie. Actuellement, les deux pays, et surtout l'Erythrée, utilisent la Somalie comme un front dans leur guerre par procuration. Ce qui ajoute considérablement à l'instabilité du pays. Mais bien que leur conflit présente des obstacles à la paix en Somalie, il n'est pas du tout impossible d'envisager un résolution de la crise qui n'inclut aucun accord entre Addis Abéba et Asmara. En fin de compte, la paix concerne les Somaliens qui pourront arriver à un accord entre eux, un accord qui garantit la justice pour les crimes et les violations commises dans ce conflit.