« L'Algérie doit opérer des ajustements en profondeur dans le secteur de l'énergie. » Telle est la conclusion à laquelle est parvenu Mustapha Mekideche, économiste et consultant en stratégie, dans son étude présentée lors d'une conférence-débat organisée par la fondation Friedrich Ebert, dimanche soir, à Alger. L'étude intitulée « Le secteur des hydrocarbures en Algérie de 1958 à 2008, problématiques, enjeux et stratégies » a permis de dégager une série de propositions jugées par l'économiste indispensables à « la mise à jour de la stratégie sectorielle de l'énergie et de ses liaisons avec les politiques de croissance ». M. Mekideche a appelé ainsi, dans son exposé, à définir « un consensus national sur le profil optimal des exportations d'hydrocarbures à moyen terme, notamment pour le gaz naturel », de « réévaluer régulièrement en toute transparence, les coûts du gaz et des inputs énergétiques en Algérie pour éviter des transferts implicites de rentes au motif d'avantages comparatifs ». Il explique ce dernier point par le fait que le prix de vente local du gaz aux industries pétrochimiques et celles fortement consommatrices de gaz est trop faible, eu égard aux évolutions des prix internationaux. Le conférencier proposera également à l'instauration d'« un modèle de consommation énergétique sobre, pour limiter les gaspillages actuels à la fois des ménages et des activités ». Pour ce qui est des relations avec l'Union européenne, M. Mekideche a estimé qu'il faudrait « redéfinir avec l'UE le contenu d'un partenariat stratégique gagnant gagnant », en ce sens que le rapport de force dans le marché mondial de l'énergie le permet à présent. Tout en appelant au lancement d'un vaste programme d'énergies nouvelles plus consistant et moins timoré, l'économiste a insisté sur la nécessité d'investir dans l'homme et les technologies pour « consolider les savoir-faire et l'expertise que le pays a développés dans le secteur des hydrocarbures ». Un secteur confronté, selon l'orateur, à deux contraintes l'une en rapport avec le marché gazier de l'UE, l'autre liée à l'accession de l'Algérie à l'OMC. En effet, explique M. Mekideche, la directive de la Commission européenne sur le gaz naturel datant de 1998 a remis en cause les dispositions contractuelles qui assuraient l'équilibre à long terme des contrats et permettaient à l'Algérie d'accéder à des financements lourds garantis. La deuxième contrainte vient de l'OMC qui interdit aux pays membres de l'Organisation la pratique, sur le marché intérieur, de prix inférieurs à ceux pratiqués à l'export. S'agissant des réserves énergétiques dont dispose le pays, l'économiste qui se réfère à des statistiques d'experts dans ce domaine, affirme que l'Algérie ne dispose que de 1% des réserves mondiales de pétrole, soit le quinzième rang avec 9,2 milliards de barils, de 2,5% des réserves mondiales de gaz, soit 4 500 milliards de mètres cubes avec une durée de vie de 54 ans. Cependant, évoquant la difficulté de déterminer avec exactitude la durée de vie des hydrocarbures, le professeur Amar Khelif, enseignant à l'université, dira qu'une récente étude effectuée sur ce sujet a montré que l'Algérie ne dispose plus que de 15 à 18 ans de réserves énergétiques avec un taux moyen d'extraction ne dépassant pas 24%. Le même intervenant a fait remarquer que le plus important, aujourd'hui, pour les Algériens c'est d'instaurer « une gestion démocratique des ressources pétrolières et gazières » qu'il qualifie de « patrimoine collectif ». Selon lui, l'Algérie est en train de priver les générations futures de ces ressources à cause de l'exploitation précipitée des gisements.