Les veillées ramadhanesques à Mila se caractérisent par l'absence quasi-totale de programmes d'animations culturelles à même de retremper les férus de musique et de spectacles artistiques dans une ambiance de détente et de repos. L'absence d'une vie culturelle à Mila est endémique dans la mesure où la programmation des représentations artistiques de bonne facture que le département de la culture a jusqu'ici concoctées est exclusivement concentrée dans la maison de la culture du chef-lieu de wilaya. Mis à part donc les habitués de cette splendide infrastructure (très bien servis et éminemment gâtés), tant ils en ont joui à saturation, les autres grands centres urbains sont réduits à faire tapisserie. Le climat de morosité et de routine est d'autant plus oppressant que de grandes daïras, comme Ferdjioua, Chelghoum Laïd, Grarem, Tadjenanet et Téleghma, continuent de compter (au plan artistique) pour du beurre, alors que la part du lion des spectacles alléchants, concoctés à l'occasion des soirées ramadhanesques 2005, 2006 et 2007, ont eu pour cadre, à de très rares exceptions, la seule ville de Mila. Cette disparité dans la répartition à sens unique des manifestations culturelles a exacerbé le marasme déjà bien ambiant au sein des populations excentrées au sud comme dans le nord montagneux de la wilaya. Comme à l'accoutumée, après la rupture du jeûne, c'est le rush, soit vers les mosquées, soit vers les cafés du patelin, c'est selon. Aigris et stoïques, les Mileviens, au pis-aller, convergent au terme des prières surérogatoires (salat Etarawih), vers les cafés crasseux et enfumés du bled pour la consommation de boissons rafraîchissantes, le temps de se livrer à des discussions mondaines. Le cherté de la vie, la rentrée scolaire et le casse-tête incontournable des fringues des gosses à l'approche de Aïd El Fitr sont les sujets favoris du commun des citoyens mileviens, spécialement les pères de familles. Dans les contrées reculées, comme dans les villes et les villages, les rues commerçantes et les placettes principales reprennent vie après le f'tour. Une animation passagère s'empare de la population à travers les kiosques multiservices, les cybercafés, les divers commerces, les rencontres entre amis et les longues et interminables parties de dominos et de cartes sur les terrasses des cafétérias ou sous les lampadaires du quartier. Hormis les sorties nocturnes et les randonnées pédestres en famille ou en couple, la gent féminine à Mila est, traditions obligent, plutôt casanière, comparativement à celle des grandes villes. Quand bien même elles ont gagné quelques galons en matière d'émancipation, les femmes et les filles de Mila qui, d'ordinaire passent des heures à faire leurs emplettes et vadrouiller dans les souks et les bazars de la cité, sont, à la tombée de la nuit, beaucoup plus enclines à se cloîtrer chez-elles. Les visites nocturnes de proches parents et le zapping des chaînes arabes, distillant à l'envi les feuilletons étrangers soporifiques, sont dès lors l'unique occupation de madame Eve durant les veillées plates et fastidieuses de Ramadhan.