El Watan a publié, dans la livraison du lundi 8 septembre 2008, un article signé Kamel Benelkadi intitulé « La capitale aura son espace vert » qui rapporte la présentation du plan d'aménagement du parc Dounya faite la veille à l'hôtel El Aurassi. Le groupe Emirates International Investment Compagny (EIIC) y est présenté comme initiateur du projet alors que c'est bien le gouvernement algérien qui en est l'initiateur, depuis les quelques années qu'il a fallu pour le maturer et résoudre divers problèmes notamment fonciers et juridiques avant son lancement. Le groupe émirati, comme son nom l'indique, ne peut être compris que comme un investisseur intéressé par le marché algérien et les facilités offertes en Algérie. Mais au-delà de ces considérations qui méritent mise au point, c'est le programme de « un peu plus de 13 000 logements avec 55 500 résidents permanents » qui tombe comme un cheveu sur la soupe et en plein Ramadhan, c'est un sacrilège. Cette information soulève beaucoup d'interrogations qui interpellent plus d'une administration, particulièrement celles chargées du domaine foncier, de l'aménagement et de l'urbanisme… Si l'on peut penser que 10% environ des employés permanents (les cadres), soit 2500, seraient attributaires de ces logements, qui seront les bénéficiaires des un peu plus de 10 500 autres logements ? Cela laisse supposer le rang social et la capacité financière de ces autres attributaires d'un programme correspondant à du promotionnel de standing compte tenu du site et du niveau de qualité que l'on doit attendre des Emiratis, mais aussi du coût du logement récupéré par l'investisseur. Mais alors, il est à douter des 19% sur les 670 hectares compris dans le périmètre du parc, réservés à ce programme de logements, soit 127 hectares, ce qui donnerait un peu plus de 100 logements à l'hectare. C'est un coefficient d'occupation de sol excessif pour de la promotion immobilière de standing, d'autant que 55 500 habitants, c'est la population d'une ville moyenne et ce grand quartier nécessitera les surfaces correspondantes, voiries et réseaux divers, équipements collectifs sociaux, éducatifs, sanitaires, de services, etc. Les intéressés par ce programme n'accepteraient pas une concentration supérieure à celles des cités Saïd Hamdine ou Garidi et encore moins similaire à celle de la cité AADL de Sidi Yahia et n'accepteraient pas un sous-équipement réduisant la viabilité du site. Tout ceci à condition de les initier à ces données urbanistiques au moment de la commande et des premiers versements de ce que l'on peut supposer devoir être une vente sur plan. Pour un taux raisonnable de 50 log/ha, 13 000 logements nécessiteraient 260 hectares à soustraire des 670 prévus pour le parc. Avec cette forme de résolution du problème foncier pour son programme de logements (mieux que la CNEP Immobilière qui avaient longtemps cherché il y a quelques années une assiette foncière dans la wilaya d'Alger pour son programme de 11 000 logements en location-vente), EIIC fait une belle affaire tout en « démentant ceux qui pensent que les groupes du Golfe ne font que dans les effets d'annonce ». Il est même à parier qu'avec cet accès privilégié au terrain à un prix avantageux et la facilité financière des versements anticipés des attributaires, que la concrétisation du programme de logements sera favorisée pour recevoir la priorité. C'est cela, le sens des affaires et pourvu que ça nous laisse quelque chose. Mais où sont les mentors de nos managers et entrepreneurs qui auraient pu monter facilement une telle opération en groupement pour l'ensemble du programme de logements ou par parties sur la base d'un plan d'aménagement global assorti des prescriptions de cohérence urbanistiques et architecturales, ce qui aurait permis par ailleurs au maître d'ouvrage de susciter une compétition bénéfique sur les plans qualité, délais et coûts ? Pour revenir aux chiffres rapportés dans l'article, 2,5 millions de visiteurs par an correspondent à 7000 visiteurs par jour en moyenne (avec des pointes de l'ordre de 20 000 en moyenne les week-end). Ceci, ajouté aux 25 000 emplois permanents, va induire un afflux et reflux de ce qu'on peut estimer à 7 à 8000 véhicules individuels et 300 bus auxquels s'ajouteront les véhicules des habitants des 13 000 logements. Des espaces importants sont alors nécessaires pour l'aménagement des places de parking et des voies de circulation, d'accès et de sortie de et vers les routes périphériques sur lesquelles la circulation serait fortement perturbée sans un réaménagement profond. Au-delà des argiles gonflantes de la zones de Ouled Fayet et des gros surcoûts de fondation des ouvrages à attendre, ce projet risque de s'enliser dans des terrains mouvants si le plan d'aménagement n'est pas sérieusement concerté et approfondi avec l'ensemble des secteurs concernés.Il est donc à souhaiter que la conférence de presse encore prévue pour aller dans les détails du plan soit l'occasion de revenir sur la relation du programme de logements avec celui du parc Dounya et l'adéquation des chiffres avancés avec les exigences d'aménagement. L'auteur est ingénieur consultant