De nouveau l'incurie des pouvoirs publics, cette fois-ci à Ghardaïa, meurtrie par les graves inondations de mercredi. La lenteur des secours a poussé les habitants de cette ville à organiser une grande manifestation au centre-ville, une lenteur vécue comme insupportable au vu du dénuement des sinistrés et du danger de mort couru par les éventuels survivants sous les décombres des habitations effondrées sous la force des pluies. La réalité est que les autorités, prises au dépourvu, devaient acheminer des engins, du matériel et des vivres des wilayas environnantes, ce qui nécessite du temps. Chef-lieu de wilaya, Ghardaïa n'a pas de dispositif propre d'intervention étoffé et efficace. D'ailleurs, la plupart des wilayas du pays n'en ont pas ou ne disposent que d'un embryon bien loin de répondre à la demande ou simplement de parer au plus pressé lorsque s'abat sur elles la furie des éléments naturels. Ces derniers, l'Algérie les subit régulièrement en automne et en hiver, sans parler des tremblements de terre fréquents à longueur d'année. Il y a eu ces dernières années de terrifiantes catastrophes, laissant derrière elles des milliers de morts et des dégâts incommensurables. Certes, les pouvoirs publics ont fini par développer une certaine prise de conscience à l'égard de cette menace permanente, mais il apparaît bien que le côté organisationnel n'a pas suivi et c'est là le cœur du problème. Il fut un temps où pouvait être évoquée la faiblesse des moyens financiers de l'Etat mais, aujourd'hui, cet obstacle est levé du fait des larges disponibilités financières tirées des exportations d'hydrocarbures. Il apparaît que l'investissement dans la prévention et le traitement des catastrophes naturelles n'est pas appréhendé comme prioritaire. Pourtant, il ne peut être accessoire, car il est directement lié à la vie des habitants. Ces derniers ont réellement le sentiment d'être abandonnés par leur gouvernement lorsqu'ils ne voient pas arriver rapidement les secours. Ce sentiment, ils l'expriment presque toujours par le recours à la rue. Du fait du dérèglement climatique de la planète, les inondations, pour ne citer que celles-là, affecteront plus souvent et plus fortement l'Algérie. D'autres wilayas seront touchées dans les prochaines semaines et les mois à venir et des désastres similaires à ceux de Ghardaïa ne sont pas à exclure. Les plus exposées sont les zones où l'habitat est précaire ou sauvage, c'est-à-dire situé sur des lieux à risques, tels les lits d'oued et là où il est conçu en matériaux de construction traditionnels, généralement à base de terre. Comme ils sont dans cette catégorie, le sud du pays et les Hauts Plateaux sont dans l'œil du cyclone et il est à espérer que la déliquescence enregistrée à Ghardaïa soit le dernier cas : l'Etat doit en tirer des conclusions le plus vite possible en dotant le pays d'une véritable stratégie d'intervention en temps de catastrophe qui se traduirait sur le terrain par un maillage dense en lourds moyens d'intervention matériels et humains.