En ce temps de grave crise mondiale, rassurer la population algérienne, c'est bien, mais lui dire toute la vérité, c'est nettement mieux. En privilégiant la solution du silence et des demi-vérités, les autorités entretiennent (la fausse) illusion que notre pays est dans une bulle et que le cataclysme financier ne l'effleure qu'à peine. Les citoyens sont presque « conviés » à vivre comme avant, sans souci aucun pour l'avenir. Est-ce une sous-estimation de la réalité qui tranche avec la gravité des propos que tiennent les dirigeants et les experts du monde entier ou est-ce, une nouvelle fois, le réflexe détestable du pouvoir consistant à « positiver » à tout prix son action ? Pourtant, le premier danger est là : les prix du pétrole qui ont déjà chuté de moitié risquent carrément l'effondrement total en raison de l'aggravation de la récession, scénario vécu en 1986 précipitant l'Algérie dans le chaos économique et politique. Et puis, comment faire face à la facture des importations alourdie ces dernières années d'une manière inconsidérée par le train de vie de l'Etat et les agissements de l'informel ? Le spectre de « l'économie de guerre » n'est pas loin et ce n'est pas une vue de l'esprit : il n'existe pas d'économie réelle, dans le pays, en mesure de pallier la rareté de l'argent des hydrocarbures. L'Algérie n'exporte que pour un milliard de dollars annuellement et les étrangers investissent sérieusement uniquement dans le pétrole et le gaz, ne trouvant pas notre pays suffisamment attractif. Ce qui a été réalisé en matière de réformes économiques par les autorités, notamment depuis une dizaine d'années, s'est avéré nettement insuffisant. L'Algérie a manqué surtout de bonne gouvernance et tous les organismes internationaux s'accordent sur ce point. Dire la vérité aux Algériens, c'est déjà gagner une bataille dans le combat à mener contre la redoutable crise financière. Car celle-ci nous frappe de plein fouet. Mais le pouvoir doit, pour cela, mettre de côté toute fanfaronnade et s'engager résolument dans le mea culpa, y compris si cela doit parasiter la campagne pour le troisième mandat présidentiel. Prendre langue avec la société politique et civile du pays est essentiel car il s'agit de ne pas rater l'autre combat, celui de la construction d'une nouvelle économie : la crise financière mondiale pourrait être mise à profit par l'ensemble des forces vives de la nation pour amorcer un autre et vrai départ. De la catastrophe qui balaie le système bancaire international, il est possible de tirer du positif pour le pays. Si le pouvoir tente ce défi, alors nous pourrions dire : vive la crise de 2008.