Membre de l'Académie des sciences et précurseur de la lutte contre le cancer, le Pr Maurice Tubiana préconise la prévention, le dépistage et les moyens thérapeutiques comme le triptyque gagnant. S'il fallait désigner le personnage qui aura marqué le plus les 4es journées internationales de cancérologie organisées du 14 au 16 octobre 2008 à la faculté de médecine de Constantine, il ne fait aucun doute que le choix se porterait sur le Pr Maurice Tubiana, un grand homme de sciences et un précurseur de la lutte contre le cancer, dont la notoriété déborde sur les cinq continents. Agé de 88 ans et natif du Vieux Rocher, il fut dans les années 1950 à l'origine de la création au sein de l'institut Gustave Roussy (France) du laboratoire des isotopes et de bêtatron, une institution qu'il a, par ailleurs, dirigée de 1982 à 1988. Il fut également, en 1964, le principal instigateur de la création à Lyon du Centre international de recherche sur le cancer, un organisme placé sous tutelle de l'Organisation mondiale de la santé. Il présidera également l'International Society of Radiologie (1985-1994) et l'Action européenne contre le cancer (1986-1994). Dans l'intervalle, le Pr Maurice Tubiana sera élu en 1988 à l'Académie des sciences. Toujours bon pied, bon œil, malgré son âge vénérable, cet homme de sciences a d'emblée conquis l'assistance présente dans l'amphithéâtre de la faculté de médecine de Constantine. Claire, concise et d'une précision chirurgicale, son intervention a porté sur l'historique et l'état actuel du cancer de par le monde. Ce qu'il faut surtout retenir, s'agissant de la genèse de cette terrible pathologie, vue par l'intervenant, c'est la diminution lente, mais inéluctable de la mortalité par cancer à compter des 1970. Il dira à ce propos que « l'étude des grands types de cancer laisse apparaître dans de nombreux pays, dont la France, une diminution sensible de la mortalité, résultant, en amont, des variations de consommation de tabac et d'alcool pour les cancers ORL et du poumon. Chez les femmes, le cancer du col utérin a pratiquement disparu chez celles faisant régulièrement un frottis. Quand au cancer de l'estomac, son taux de mortalité a été divisé par cinq, en raison essentiellement des progrès sensibles enregistrés en matière d'hygiène et d'alimentation, celle-ci étant actuellement plus saine, grâce à la consommation de plus de produits frais et moins de conserves. Pour sa part, le cancer du sein chez la femme est marqué, au sein de l'Union européenne, par une augmentation de son incidence et cela est dû, surtout après la ménopause, à la prise de poids, l'insuffisance d'exercice physique, le retard pris à l'âge de la première grossesse, la durée de plus en plus brève de l'allaitement, les traitements hormonaux substitutifs à la ménopause et la consommation d'alcool ». De son point de vue, l'ensemble de ces facteurs répondent aux interrogations posées quant à l'accroissement des cancers post-ménopauses estimés à 25%. Evoquant la baisse de la mortalité, le Pr Maurice Tubiana dira qu'elle s'explique par la mise en œuvre de dispositifs de prévention et de dépistage, mais aussi grâce aux progrès thérapeutiques. Insistant sur ce dernier chapitre qu'il juge primordial dans la lutte à mener contre le cancer, l'éminent cancérologue français estime que « le volet prévention est fondé sur une analyse épidémiologique des causes du cancer et celle-ci doit impliquer médecins généralistes, médecins de santé publique et sociologues. Le dépistage exigeant des moyens importants, il est primordial d'en évaluer le coût et d'estimer son efficacité dans les conditions réelles de sa mise en œuvre. Quant aux aspects thérapeutiques, il est essentiel de se reposer sur des coopérations multidisciplinaires entre chimiothérapeutes, chirurgiens et radiothérapeutes ».