Voilà que le tant redouté impact de la crise financière internationale s'impose maintenant à l'Opep qui doit prendre ses responsabilités face à la dégringolade des prix du pétrole. Sa toute prochaine réunion, prévue initialement pour le 18 novembre 2008, a été avancée en toute urgence à vendredi prochain à l'effet de contenir les effets de la crise, qui commence à atteindre l'économie réelle en installant déjà la première économie mondiale dans la récession. A quelques jours de ce rendez-vous aussi important que nécessaire pour la stabilité du marché, tout indique que l'organisation va tenter de donner un signal fort en vue de permettre la reprise des cours du brut. D'ores et déjà, il s'agit de savoir ce que fera l'Opep de l'excédent d'offre des 2 millions de barils/jour recensé sur le marché, selon le président en exercice de l'Opep, Chakib Khelil, intervenant hier soir au journal télévisé de Canal Algérie. Il faut noter que les stocks américains sont en hausse. Néanmoins, « plus l'action est importante et rapide et mieux c'est pour la stabilité ; plus l'action est trop lente et hésitante et plus difficile sera le rétablissement », a déclaré le week-end dernier M. Khelil. Ainsi, au cours de cette réunion sera examinée une baisse de l'offre. Sera-t-elle conséquente au point de permettre la remontée des prix à des niveaux acceptables par les pays producteurs ? Hier soir toujours, M. Khelil a affirmé qu'un « consensus » s'est dégagé par « tous » les pays membres de cette organisation, afin de tenir sous le sceau de l'urgence cette réunion vendredi prochain. « Nous allons défendre nos intérêts de manière sage... en tenant compte des intérêts des consommateurs », a-t-il répondu à une question sur la toute récente attitude de certains pays consommateurs demandant à l'opep de ne pas baisser son offre. Et de qualifier cette demande de « contraire à la rationalité », voire « contraire à leurs pratiques eux-mêmes sur le système financier », où ils laissent jouer les règles du marché.« Il y aura une baisse et il faut qu'elle soit importante pour établir l'équilibre entre l'offre et la demande. si c'est 1 million de barils, ce sera 1 million. Si c'est 1,5 million de barils, ce sera 1,5 million et si c'est 2 millions de barils, ce sera 2 millions de barils », a déclaré M. Khelil samedi dernier à Tamanrasset. La question des prix reste toutefois entière aujourd'hui, notamment en raison de la position non exprimée de l'Arabie Saoudite, un pays membre influent de l'Opep. Pour sa part, l'Iran, par la voix de son représentant à l'organisation, Mohammad Ali Khatibi, a déclaré qu'il « semble qu'une baisse du plafond de production d'un à trois millions de barils sera discutée lors de la réunion du 24 octobre ». Ainsi, si le principe d'une réduction du niveau de l'offre paraît principalement acquis en dépit du silence de certains membres, il n'en demeure pas moins que l'enjeu principal reste la défense des prix. Quelle sera la nouvelle fourchette des prix du pétrole dégagée à l'issue de cette réunion à laquelle ont appelé (sous le sceau de l'urgence) les pays producteurs membres de l'Opep ? Il va sans dire, en effet, que des pays comme l'Algérie accordent une importance particulière à cette question, du fait qu'elle tire la quasi-totalité (98%) de ses revenus extérieurs de cette ressource. Selon M. Khelil, l'Algérie a engrangé des recettes de 80 milliards de dollars en 2008. L'enjeu reste alors pour l'année 2009, selon lui. D'autres pays également sont tout aussi concernés et, par endroits, plus que l'Algérie. Le Nigeria, l'un des premiers exportateurs africains de pétrole, va devoir réduire son budget 2009 à cause de la chute des cours. Selon certains analystes, le Venezuela pourrait connaître des difficultés similaires, malgré les démentis des autorités. L'Algérie est pour l'instant dans sa marge « de sécurité » si l'on considère que la prochaine loi des finances a été élaborée sur la base d'un baril à 37 dollars (en réalité autour de 65 dollars pour un budget équilibré). A quelques variantes près, tous les pays de l'Opep sont concernés par la chute des prix. Et il s'agit, plus que tout, de savoir si réellement au vu de la nature de la crise actuelle la baisse de l'offre du brut va permettre le retour à la hausse des cours. De plus, l'Opep va-t-elle résister aux pressions des pays consommateurs qui se font déjà insistantes, comme la dernière déclaration de Gordon Brown ? « Nous voulons un prix de baril stable, ni trop élevé ni trop bas, entre 70 et 90 dollars », a estimé M. Khelil, qui a expliqué que ce niveau arrangerait les pays de l'Opep, lesquels revendiquent un niveau des prix autour des 50 dollars alors que d'autres membres de l'organisation veulent un baril à 100 dollars. Ce qui est certain, c'est que le prix du baril est tombé, jeudi dernier, sous les 70 dollars à New York, au plus bas depuis août 2007. Et le risque de plus en plus menaçant d'une récession mondiale fait craindre une chute plus prononcée des niveaux des prix du pétrole, du fait de la menace d'une baisse d'activité et, donc, de la demande. L'Opep produit actuellement 28,8 millions de barils de pétrole/jour. Elle assure quelque 40% de la production mondiale de brut. Selon Chakib Khelil, la demande viendrait de la Chine.