La région de l'Asie du Sud et du Sud-Est aurait eu besoin d'un système de surveillance et d'alerte pour tenter de prévenir les dégâts matériels et les pertes humaines causés, avant-hier, par des raz de marée (tsunamis), estiment les spécialistes. Cette catastrophe devait se produire un jour, affirment-ils, car deux plaques tectoniques se croisent près de Sumatra, en Indonésie, engendrant ainsi une importante activité sismique. C'est pourquoi un système de surveillance pour l'océan Indien devrait être mis en place, prochainement, avec l'aide de l'Australie, selon une offre faite hier par son Premier ministre John Howard. Ce pays fournit déjà des informations à un centre de surveillance des tsunamis dans l'océan Pacifique. L'Onu a soulevé l'absence d'un tel système alors que des pays de la région se rendent compte, aujourd'hui, de l'importance de pareil mécanisme. Au Sri Lanka, par exemple, les autorités ont regretté qu'elles n'aient pas tiré les leçons des inondations qui avaient ravagé le sud de l'île en 2003 avec un bilan de 255 morts. « Nous avons été très complaisants. Les gens prédisaient des tremblements de terre, des raz de marée et nous avons même ressenti quelques secousses récemment, mais de toute évidence nous n'avons pas pris ces avertissements au sérieux », a reconnu un responsable du gouvernement. L'Indonésie a connu des tsunamis à de nombreuses reprises. Or même « si le pays avait eu conscience du danger, il ne possédait aucun système pour en informer les autres pays qui se trouvent le long de l'océan Indien », affirme un spécialiste de l'université de Tokyo. Pour Philippe Lognonne, de l'Institut de physique du globe IPG/CNRS de Saint-Maur (près de Paris), « si à ce jour il n'existe aucun moyen sérieux de prédire et prévenir les séismes, on a le temps d'alerter les populations dans le cas d'un tsunami ». Mais à condition, précise-t-il, qu'il y ait un protocole d'alerte qui fait cruellement défaut dans la zone de l'océan Indien. « On en revient à des considérations économiques, les protocoles d'alerte sont efficaces dans le Pacifique, là où existent des intérêts économiques américains, et au Japon, où on voit même des systèmes d'écluses automatiques », note cet expert. Pourtant, Carolyn Bell, porte-parole de l'Institut de géophysique américain (USGS) estime que la création d'un réseau d'alerte aux tsunamis dans l'océan Indien, à l'image de ce qui existe pour le Pacifique (Japon, Hawaï, etc.), serait « un défi ». Pourquoi ? Selon cette spécialiste, le nombre de pays concernés ainsi que le niveau d'éducation des populations de cette région du monde constituent un handicap pour un système efficace. Sur cette question, l'université publique du Tohoku (Japon) a transféré ses techniques de prévention très avancées en matière de tsunamis à 15 autres pays de la région pacifique, a affirmé le journal Yomiuri Shimbun. Le Japon, qui possède des technologies de pointe, a lui aussi à apprendre de cette catastrophe naturelle, écrit ce quotidien. Depuis le séisme de Kobé en 1995 avec son bilan de 6433 morts et plus de 40 000 blessés, ce pays a amélioré sa façon de traiter les tremblements de terre tout en bénéficiant d'un système d'alerte rapide aux risques de tsunami, rappelle-t-on.