La rentrée universitaire de ce matin ne ressemblera à aucune autre. La mort violente d'un enseignant dans l'exercice de ses fonctions de chef de département informatique laissera d'indélébiles traces. C'est la conviction de tous les enseignants de l'université de Mostaganem, lieu de ce sinistre drame, mais également de toutes les universités du pays. Les étudiants ne sont pas en reste. Passés les premiers moments d'affolement et d'incompréhensions – s'agissant surtout de la personnalité de l'auteur du crime qui est décrit comme étant un bon élément, dont la simplicité et la piété sont citées en exemple par ses collègues –, les principaux représentants des organisations estudiantines ont tenu une réunion de travail avec le nouveau recteur. Réunion au cours de laquelle les incertitudes liées à la reprise des cours auraient été abordées avec sérénité et esprit de responsabilité. Individuellement, enseignants et étudiants ne cachent pourtant pas leur scepticisme quant à une reprise rapide et complète des enseignements. Des professeurs chevronnés ne cachent pas leur crainte de ne pouvoir aborder ce retour dans les amphis avec le même allant et le même enthousiasme qu'auparavant. Non pas qu'ils craignent de nouveaux débordements de la part de leurs étudiants, mais à cause de l'insoutenable image de leur collègue gisant dans son sang. Ce professeur de langues ne tolère plus le fait de servir de paravent – au même titre que ses nombreux collègues dont la probité, l'honnêteté intellectuelle et la compétence sont soulignées avec force par les collègues et les étudiants de différents paliers –, à toutes les magouilles qui empestent les campus. D'où cette ambiance morbide dans laquelle les premiers cours risquent de baigner. Beaucoup d'enseignants envisagent de réserver les premières minutes à revenir sur la dernière semaine pour tenter de comprendre, mais surtout de renouer le dialogue au niveau des amphis. Une tâche indispensable à laquelle très peu d'universitaires auront été préparés. Dépasser la mort du collègue Benchehida pour bâtir une autre université n'est pas une tâche aisée. Car, pour y parvenir, il faudrait que chacun laisse ses rancoeurs au vestiaire. Lourde tâche que des années de dévoiements auront largement alimentée. Pourtant, dans leur grande majorité, nos interlocuteurs des deux bords sont conscients de la nécessité d'aller de l'avant.