Aux prévisions qui se voulaient plutôt nuancées et rassurantes sur les effets de la crise financière internationale sur l'économie algérienne enregistrées ici et là, de la bouche notamment du premier argentier du pays, Karim Djoudi, ministre des Finances, le président Bouteflika a opposé une autre grille de lecture moins optimiste, pour ne pas dire franchement à rebrousse-poil du discours officiel. M. Bouteflika prédit des lendemains sombres pour l'Algérie, un « séisme économique » si le pays n'arrive pas à se sortir rapidement du piège de la dépendance pétrolière de son économie. Une politique qui a montré toute sa fragilité et sa précarité avec les perturbations que connaît le marché énergétique suite à la dégringolade du prix du baril de pétrole qui a perdu en quelques mois plus de la moitié de sa valeur. Depuis l'apparition des premiers signes de la crise financière mondiale aux Etats-Unis, avant de s'étendre en Europe et en Asie, on assiste dans les pays touchés par les effets de la crise à un véritable branle-bas de combat pour mettre en place des plans de sauvetage de leurs systèmes financiers et économiques respectifs en injectant dans les banques menacées par la faillite des capitaux publics des montants à donner le vertige. Une véritable guerre économique est engagée avec en toile de fond une réflexion par les grandes puissances industrialisées qui fait son chemin sur la refondation du système capitaliste qui a démontré que le marché « n'avait pas toujours raison » pour reprendre la formule du président français Nicolas Sarkozy. Partout dans le monde, la mobilisation est à son maximum pour tenter de faire face à la crise ou à tout le moins en atténuer ses effets dévastateurs. Y compris dans les économies des pays pauvres ou émergeants qui ne tarderont pas à connaître les retombées de la crise mondiale avec la chute des prix des matières premières, conséquence de la récession économique qui affecte l'économie mondiale et du retrait massif des capitaux des investisseurs étrangers de ces pays, lesquels sont rapatriés – paradoxe de l'histoire – dans les économies des pays industrialisés qui offrent désormais de meilleurs avantages en termes d'opportunités d'investissement à la suite les plans de sauvetage initiés dans ces pays. L'Algérie, qui avait été servie durant cette dernière décennie par une conjoncture économique et financière des plus favorables avec l'envolée qu'a connue le prix du pétrole qui a atteint des seuils jamais égalés et par des conditions climatiques qui auraient pu impulser un véritable essor de notre agriculture, découvre aujourd'hui que son bas de laine, aussi gorgé soit-il, ne constitue pas un système immunitaire viable apte à nous prémunir contre les dérèglements de l'économie mondiale. Le discours sur l'après-pétrole relayé par tous les gouvernements qui se sont succédé depuis l'indépendance est toujours resté, un demi-siècle après l'indépendance, à l'état de discours et de vœu pieux. Avec les réserves de pétrole qui s'amenuisent, fruit d'une politique énergétique volontariste et monétariste et les prix qui s'effondrent, l'Algérie a certainement raté l'occasion historique et bénie d'amorcer son décollage économique. L'Algérie a mangé son blé en herbe.