Les banques islamiques, qui se targuent d'une bonne santé financière en ces temps de crise mondiale, sont devenues une réelle curiosité même dans les sociétés occidentales. Un forum sur les perspectives de la finance islamique dans le pays sera organisé demain à Alger, a indiqué hier Zoubeir Ben Terdeyet, consultant et manager de la société française Isla Invest Consulting lors de son passage au forum d'El Moudjahid. Cette rencontre, dédiée aux institutions bancaires et financières du pays, s'attellera, selon ses promoteurs, à trouver les voies et moyens à même de faire d'Alger « le hub de la finance islamique » de demain. Les participants au forum auront à débattre, entre autres, des potentialités du marché algérien et des défis à relever, notamment en termes d'adaptations réglementaires, fiscales et surtout de formation, a fait savoir M. Ben Terdeyet, pour qui, « l'Algérie accuse un sérieux retard même par rapport à ses voisins ». Pour lui, « en Algérie, il faut faire face à un double défi : développer la culture financière en générale et la culture islamique en particulier ». Dans le monde, a-t-il dit, les banques islamiques pèsent quelque 700 milliards de dollars, mais ne représentent que 1% de la finance mondiale. Pour sa part, le représentant de la banque El Baraka, Hider Nacer, qui a plaidé la cause des banques islamiques, a estimé que la réforme du système financier international devra se faire sur la base de l'expérience des banques islamiques. Pour lui, la crise financière mondiale est imputable à la séparation de la sphère réelle de la sphère financière, alors que, explique-t-il, dans les banques islamiques, toutes les opérations doivent se faire dans la sphère réelle. Plus loin, il se ravisera quant aux répercussions de la crise dans un monde globalisé sur ces banques, en considérant que même si elles ne disposent pas de fonds spéculatifs, leurs investissements dans l'immobilier et autres actifs réels seront touchés. Et d'ajouter que si les banques occidentales et les fonds souverains décident de se tourner vers ces banques, « le marché de la finance islamique va exploser », tout en s'inquiétant d'une éventuelle « perversion » du concept islamique qui en découlera. Une « perversion » dénoncée par certains intervenants qui n'ont pas manqué de relever que la banque El Baraka pratique un taux d'intérêt « déguisé » et pour qui la dénomination islamique ne sert que « d'appât » pour une certaine clientèle soucieuse d'échapper à la « riba » qui est contraire à la loi islamique (charia). Ce dont M. Hider se défend en déclarant que les produits de sa banque diffèrent de ceux mis sur le marché par ses concurrents, tout en reconnaissant que ce n'est pas encore « l'idéal banking islamique ». Première banque islamique à activer sur le marché algérien, El Baraka Bank n'occupe actuellement que 1,8% du marché et 15% du marché bancaire privé, a indiqué M. Hider. Pour lui, les banques islamiques sont récentes dans le pays et les problèmes qu'elles rencontrent sont liés non pas au manque de ressources mais aux opportunités d'investissement de leurs fonds. Tout en considérant que la spécificité de ces banques n'est pas encore prise en charge sur le plan réglementaire, il n'a pas manqué de relever que la banque islamique ne doit pas oublier le créneau de la banque de détail. « Cela discrédite un peu la banque quand elle investit dans les hôtels 5 étoiles et autres palaces et oublie les logements pour les musulmans aux revenus modestes ou moyens », a-t-il fait remarquer. Par ailleurs, M. Hider a fait savoir que sa banque va se lancer, dès fin novembre, dans l'accompagnement financier des très petites entreprises (TPE) algériennes à travers le produit islamique « El moucharaka » dont le projet a été confié à une société suisse de services non financiers (FIDS).