Qui en Europe aujourd'hui se rappelle de Sembene Ousmane ? Depuis la disparition du grand écrivain et cinéaste africain, le silence est assourdissant. Il lui a été rendu un timide hommage à la Mostra de Venise en septembre dernier. Seul le Festival de Salonique aujourd'hui relève le défi et efface l'injuste oubli. Son fils, Alain Sembene, qui rêve de transformer la célèbre maison de Yoff, où vécut son père, en musée du cinéma, assiste à Salonique à cette rétrospective très attendue. Il était très certainement difficile de rassembler ici en Grèce tous les films de Sembene, Le Mandat, Borom Sharett, La Noire de..., Ceddo, Mooladé... Il est plus facile de trouver les livres de Sembene dans la vitrine des libraires que la trace des copies de ses films éparpillées entre les cinémathèques, les laboratoires, les caves des ministères de la culture et un peu partout. Mais impossible n'est sûrement pas grec ! Despina Mouzaki, directrice du Festival de Salonique, et son équipe ont réussi à rassembler les objets rares. C'est un signe attachant de solidarité et de respect pour cet immense artiste disparu et pour l'ensemble de la culture et du cinéma du continent. Le public cinéphile grec, mais aussi les cinéastes grecs de tout premier plan qui assistent au Festival de Salonique vont voir ou revoir tous ces films avec le désir de se rapprocher du cinéma africain et peut-être de mieux voir et comprendre les problèmes du continent. Sembene Ousmane est mort le 9 juin 2007. Il était âgé de 84 ans. Né en Casamance en 1923, il a fait la guerre comme tirailleur ; puis de retour au Sénégal, il a exercé tous les métiers, comme plus tard à Marseille où il a travaillé comme cheminot puis docker au port. Ecrivain puis cinéaste (depuis un stage à Moscou), Sembene Ousmane était devenu la conscience du cinéma africain durant de longues décennies.