Les marchés pétroliers sont-ils pris dans le filet d'un irréversible affaissement ? Les experts et spécialistes les plus avertis ne sont pas loin de le penser. Hier, les cours de l'or noir affichaient de nouvelles pertes sur un marché carrément livré aux appréhensions liées au recul des Bourses et à la dégradation des perspectives de demande énergétique. Sur les tableaux, le brent de mer du Nord (pour livraison en janvier) s'échangeait à 52,23 dollars, en baisse de 7 cents, alors que le baril de light sweet crude pour livraison en décembre valait 54,90 dollars, cédant 5 cents sur le New York Mercantile Exchange (Nymex). Très lié à la situation des bourses mondiales, le marché énergétique a reculé dans la matinée d'hier des suites des replis enregistrés sur les marchés financiers et d'autres « mauvaises nouvelles » émanant des banques et de l'industrie. En clair, les cours du pétrole sont descendus dans la matinée d'hier à 51,25 dollars à Londres et 54,13 dollars à New York. Le prix du panier regroupant les 13 pétroles bruts de référence de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) s'est établi aussi en baisse par rapport à son prix de clôture vendredi, lit-on dans une note diffusée hier par l'organisation. Le panier-OPEP a reculé ainsi de 1,13 dollar pour s'établir à 47,96 dollars le baril contre 49,09 dollars le baril vendredi, à son dernier jour de cotation de la semaine. En début d'après-midi, les cours du brut progressaient timidement à l'ouverture des échanges. Sur le marché Nymex, le baril de light sweet crude pour livraison en décembre s'échangeait à 55,40 dollars, en hausse de 45 cents par rapport à son cours de clôture de lundi. Les experts du secteur sont plus que jamais sceptiques quant à un rebondissement des prix sur plusieurs échelles. La récession économique en Amérique, en Europe et en Asie freine la locomotive qui, en conséquence, est appelée à tirer encore les prix vers le bas. Le Japon, deuxième économie mondiale, a annoncé lundi qu'il avait rejoint la liste des pays entrés en récession, à l'instar de l'Allemagne et de l'Italie. L'OPEP a révélé dimanche, dans son rapport mensuel, la réduction de 260 000 barils par jour son estimation de demande mondiale pour 2008. Dans un autre rapport, la Banque mondiale mise, elle, sur un prix du baril ne dépassant pas les 75 dollars en 2009-2010. En d'autres termes, le prix annuel moyen du baril devrait se situer dans une fourchette comprise entre 74,5 et 75,8 dollars, selon le même rapport. Les prévisions sont pour ainsi dire plus optimistes que celles du vice-Premier ministre et ministre des Finances russe, Alexeï Koudrine, qui avait tablé la semaine dernière sur un baril à 50 dollars en 2009, 55 dollars en 2010 et 60 dollars en 2011. Le recul de la demande mondiale dans les pays industrialisés et les prévisions d'une faible croissance dans les économies émergentes est le prétexte avancé par la Banque mondiale pour expliquer la baisse des cours du pétrole. Les prix sont tombés, rappelons-le, de 144 dollars le baril en juillet à 55 dollars à la mi-novembre 2008. La BM estime aussi que « les livraisons de pétrole en provenance des pays non membres de l'OPEP devraient augmenter durant le quatrième trimestre 2008 ainsi qu'en 2009 ». Toutefois, le cabinet londonien Centre for Global Energy Studies (CGES) vient rectifier les prévisions de la BM, estimant que la demande mondiale de pétrole devrait baisser en 2008 pour la première fois depuis 25 ans, soit depuis 1983. Les pronostics du cabinet CGES sont basés sur les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), le département américain de l'énergie et l'OPEP qui tablaient ces derniers jours sur une forte baisse de la demande. Un détail de taille : le rapport mensuel du cabinet CGES ajoute que dorénavant la direction des prix dépendra de la manière et de la rapidité avec laquelle l'OPEP réduit sa production pour répondre au déclin de la demande pétrolière. En un mot, l'OPEP ne devra plus se permettre les demi-mesures. La prochaine entrevue qui devra regrouper les membres de cette organisation est fixée pour le 29 du mois en cours au Caire.