Mais, pour 1968, l'exception est valable, ce qui expliquerait le titre de la conférence que donneront cet après-midi au CCF d'Alger la directrice du Musée d'histoire contemporaine, Geneviève Dreyfus-Armand, et l'historien Robert Frank, spécialiste de l'Europe et des relations internationales. Deux pointures en mesure de dresser un tableau de ce « temps des contestations » qui apparaît encore comme un temps mythique. Il s'agira de montrer d'abord que 1968 ne se limite pas à la France ni à l'Europe, mais fut un mouvement international qui défricha de nouveaux espaces d'expression, de pensée et de modes de vie. A Berlin, à Berkeley, à Londres, mais dans de nombreuses autres villes du monde, une nouvelle génération pointait son nez dans l'histoire, portée par la contestation sociale au sein des sociétés occidentales ainsi que par les dernières luttes d'indépendance ou les nouveaux combats dans le Tiers-Monde. Ce fut comme une immense bouilloire où se croisèrent les figures de Che Guevara, de Ho Chi Minh, des Beatles, de Mao Tse Toung, des mouvements beatnik et hippie, des Rollings Stones, du Living Theater, du féminisme, des combats syndicaux, des activistes armés, des nouvelles entreprises… L'opposition à la guerre au Vietnam fut l'un des abcès de fixation de cette déferlante mondiale de même qu'un tremplin. Ces années ont été un passage historique qui, récupéré largement par les sociétés de consommation, a néanmoins bouleversé le monde. A partir de samedi, la Fimathèque Mohamed Zinet présentera un cycle de films intitulé « Mai 68 au cinéma ». On y verra d'abord samedi le fameux documentaire de Patrick Rotman intitulé simplement 68. Une fresque construite à partir d'images d'archives en couleurs souvent inédites, allant de Paris à Saïgon, de Washington à Prague, Mexico ou ailleurs, sur des musiques de Jimmy Hendrix, Janis Joplin ou des chansons de Joan Baez. Dimanche, le mythique Festival Panafricain d'Alger de William Klein, restituera cet événement qui en 1969 consacra Alger capitale des mouvements révolutionnaires dans le monde en lui donnant dans l'euphorie et la fête les couleurs dansantes de l'Afrique. Mardi, ce sera le tour du documentaire court (27 mn) mais fort de Chris Marker, intitulé La sixième face du Pentagone qui, à partir d'une marche vers le temple de la puissance militaire américaine qui eut lieu en 1967, relate l'opposition à la guerre au Vietnam. il sera suivi du film d'Alain Resnais et Jean Rouch, illustrera les effets sur la fiction des événements de cette époque. Adapté de la bande dessinée de Gébé L'An 01, le film explore un imaginaire nouveau à travers une société qui décide « d'arrêter tout » pour prendre le temps de se repenser entièrement. De quoi réfléchir sur cette « époque épique » pour reprendre un vers de Léo Ferré. Une époque à laquelle les barricades actuelles de Grèce donnent une actualité saisissante, quarante ans après Rachid Sila. Conférence « Les années 68 : le temps des contestations » par Geneviève Dreyfus-Armand et Robert Frank. Auj. à 14 h 30 au CCF d'Alger. Cycle « 68 au cinéma », de samedi à mardi, à 18 h. Filmathèque M. Zinet. Ryadh El Feth. El Madania