Visiblement prédestinée à un devenir meilleur, de par sa proximité d'avec la RN5, l'un des axes routiers principaux reliant Alger à l'est du pays, Ighrem, une localité sise à environ 40 km à l'est de Bouira, se trouve comme recluse dans sa désuétude et son sous-développement voulu par des autorités qui n'accordent pas beaucoup d'égards quant au développement d'un cadre de vie viable et productif du citoyen. La population établie depuis des lustres sur ce lit d'oued, avoisinant les 5000 âmes, continue à s'accommoder avec le décor dressé à l'époque des regroupements implantés par les autorités coloniales, dans le seul et unique souci d'y créer des ghettos permettant d'isoler la population des maquis. Ironie du sort, à l'orée du 3e millénaire, 46 ans après l'indépendance du pays, les chaumières d'antan, de surcroît menaçant ruine, trônent encore à ce niveau, comme pour témoigner de la douloureuse époque coloniale. Les habitants de la localité, désabusés, s'insurgent contre l'APC (Ahnif) qui, selon eux, n'a pas daigné, à ce jour, y inscrire un quelconque projet d'aménagement urbain, à même de rendre le cadre de vie acceptable pour les citoyens. « Il suffit d'une petite averse pour s'embourber dans la fange, le village devient un bourbier pendant la saison hivernale, et en été, c'est la poussière suffocante qui supplante la boue », constate Boualem, trentenaire, pour qui l'APC « n'a, à aucun moment affiché une volonté d'agir face à la dégradation des ruelles du village, notamment, suite à la réalisation d'un nouveau réseau d'assainissement, vraisemblablement, mal fait. Idem pour les quartiers périphériques, où les pistes agricoles faisant jonction avec le village à l'image de celle de Buzermane–un quartier où est implantée une partie importante de la population d'Ighrem–sont complètement dégradées avec, en prime, l'absence d'éclairage public ». Et à un autre plaignant, tenant une petite échoppe, de tirer à boulets rouges sur les élus locaux qui n'ont pas, selon lui, « tenu leurs promesses de relooker le village par un aménagement urbain adéquat ou bien l'octroi d'une aide pour résorber les quelques taudis restants. N'avaient-ils pas prétendu, tambour battant, durant la campagne électorale municipale de faire quelque chose au village ? », conclut-il. Sur un autre volet, les jeunes du village s'interrogent sur le sort réservé à la bâtisse de l'ex-mosquée du village laissée à l'abandon après que la nouvelle mosquée fut ouverte aux fidèles. « N'est-il pas utile de songer à y aménager une classe pour les enfants du préscolaire et/ou d'y dispenser des cours pour les analphabètes du village ? », lâche dépité Farid, universitaire qui croit dur comme fer, que les raisons ayant concouru au sous-développement du village Ighrem est l'absence d'un comité de village représentatif. Et pour cause, que devient, en fait, Thajemaât (comité du village) du bon vieux temps, cette structure ancestrale qui a toujours su gérer les affaires courantes de la cité et, partant, réclamer les droits des citoyens. Pour Hakim, licencié en sociologie, visiblement observateur averti : « Le déclin de ces structures d'organisation ancestrale est voulu, car il a permis aux relais du pouvoir qui se sont autoproclamés de représenter, au grand dam des villageois, ces villages dont les revendication sont, du coup, tuées dans l'oeuf », poursuit-il tout en invitant les jeunes à s'impliquer davantage dans la gestion de la cité. Par ailleurs, les villageois reprochent aux élus successifs ayant présidé aux destinées de la commune d'Ahnif d'avoir marginalisé le village dont la population a quadruplé depuis la construction de la cité de regroupement qui, force est de le constater, nécessite une assiette foncière viabilisée pour recaser le surplus d'habitants dans le cadre de l'auto-construction. Aussi, il est fait état, par certains, de la nécessité de délivrer des actes de propriété à tous les habitants du village, pour leur permettre de postuler à des aides de l'Etat destinées à la construction, notamment dans le cadre de l'habitat rural.