La filière publique du bâtiment vient de faire l'objet d'une réorganisation à l'initiative du Conseil des participations de l'Etat. Qu'est-ce qui a bien pu motiver ce énième redéploiement ? Dans les années 1990, les entreprises publiques de bâtiment avaient dû s'adapter à l'atomisation des programmes de construction que la crise économique avait considérablement réduits. De nombreuses entreprises ont dû se contenter de quelques petits marchés pour survivre. Les répercussions négatives sur les résultats de gestion sont perceptibles à travers la déstructuration financière de bon nombre d'entre elles. Favorisé par l'embellie financière que connaît le pays, le marché algérien de la construction a totalement changé. La réalisation d'un million de logements est annoncée pour le quinquennat qui vient, ce qui suppose la construction de grands ensembles immobiliers qui requièrent la présence de grandes entreprises. Il était donc nécessaire de redimensionner l'outil public de réalisation pour répondre à cette nouvelle exigence. Le redéploiement obéit en grande partie à cette logique de réadaptation aux nouvelles réalités du marché de la construction. L'ouverture de ce marché à la concurrence internationale requiert, par ailleurs, la présence d'entreprises algériennes capables d'arracher des parts de marché face à des sociétés étrangères bien équipées mais surtout mieux organisées. Le redéploiement en question vise à conforter par un certain nombre de mesures l'outil national de réalisation de manière à ce qu'il puisse prendre une part active à la gigantesque offre publique de construction en faveur de laquelle l'Etat va consacrer de très gros budgets. L'effort d'investissement à consentir pour mettre à niveau les entreprises publiques de bâtiment est énorme tant le retard est grand dans ce domaine... Effectivement, le désinvestissement a été le lot de pratiquement toutes les entreprises publiques de bâtiment durant ces 15 dernières années. Toutes les entreprises qui vont entrer dans notre groupe en pâtissent. Et le challenge consistera précisément à reprendre en main ces entreprises qui disposent du minimum d'équipement et d'un fonds d'expérience, de manière à leur donner un surcroît de performance. Il faudra, pour ce faire, les réorganiser en les faisant assister par une ingénierie très forte. Nous ne savons même pas organiser le travail d'un chantier qui suppose un support d'ingénierie énorme. Ce n'est plus possible de continuer à travailler ainsi d'autant plus que nos entreprises sont appelées à contracter de gros chantiers. Je tiens par ailleurs à préciser qu'il n'y a que l'industrialisation de la construction qui peut redynamiser le bâtiment. L'industrialisation en question devra toucher l'ensemble des corps d'état et non pas seulement le gros œuvre. En industrialisant les travaux de second œuvre (plomberie, électricité, menuiserie, etc.), les programmes auront à l'évidence beaucoup plus de chances d'être achevés dans les délais. Prétendre venir à bout des programmes de construction avec des moyens et des méthodes aussi archaïques serait illusoire. C'est pourquoi il faut absolument faire un saut vers l'industrialisation et le plus tôt sera le mieux. C'est une des principales missions assignées aux groupes qui viennent d'être créés dans le cadre du redéploiement d'un certain nombre d'EPE du bâtiment décidé par le CPE. En quoi consiste précisément ce redéploiement ? La nouvelle configuration tourne autour de 4 groupes ayant le statut de société par actions et qui disposent de larges prérogatives pour faire de l'investissement, de l'industrialisation, de la réalisation et éventuellement de la promotion immobilière. Ces groupes sont dirigés par des directeurs généraux uniques et leurs organes sociaux sont des conseils d'administration. Il y en a un à l'Est, un à l'Ouest et deux au Centre. Le groupe Sogecor que je dirige est un groupe ensemblier qui regroupe des entreprises ayant des activités compatibles avec les objectifs du groupe. Parmi ces entreprises il y a l'ECSM Sidi Moussa qui réalise la charpente métallique, l'EPLA qui réalise la menuiserie aluminium, l'EBA qui fait du gros œuvre, le CNIC spécialisé dans l'ingénierie de la construction etc. Les entreprises qui intégreront les groupes seront traitées au cas par cas en fonction de leur situation patrimoniale, la spécificité de leur métier de base et de leur contribution au développement du groupe. Quel traitement sera réservé à la vingtaine d'entreprises de bâtiment en faillite ? Il y aura évidemment des dissolutions mais en prenant le soin de redéployer leurs travailleurs ainsi que leurs actifs. Il y aura par conséquent des entreprises absorbantes et des entreprises qui seront absorbées. Il y aura concentration des investissements au niveau du groupe qui pourra ainsi faire de la régulation au profit de l'ensemble des filiales. L'entreprise privée a-t-elle une place à l'intérieur de ces groupes ? Les groupes sont ouverts à toutes propositions de partenariat que nous feront les entreprises privées nationales et étrangères pour peu qu'elles améliorent le niveau technique et technologique du bâtiment. Dans ce même souci, nous n'hésiteront pas à solliciter la contribution de nos meilleures compétences, y compris nos élites expatriées avec lesquelles nous avons du reste commencé à prendre contact.