Les blocages nés de l'usage abusif et presque exclusif de ce qui est appelé « droit » de veto doivent motiver la communauté internationale à revoir, de fond en comble, ce système. La passivité du Conseil de sécurité face au drame de Ghaza est une preuve claire du peu d'efficacité de cet organe exécutif de l'ONU. En termes crus, il ne sert à rien ! Le supprimer ne risque pas d'accélérer la dérive des continents. Le garder serait insulter chaque jour le droit international. Les bombardements israéliens de la bande de Ghaza, qui ont tué des centaines de civils dont des enfants, ciblant parfois des mosquées, des hôpitaux et des écoles, violent de manière manifeste les conventions internationales comme celle de Genève. Se taire sur cette situation est faire preuve de complicité. Il n'existe pas d'autre mot pour qualifier l'attitude indifférente du Conseil de sécurité au moment où le nombre de civils morts dans la bande de Ghaza dépasse les 630. Ne pas agir pour stopper le massacre à Ghaza équivaut à une disqualification de cette structure devant la communauté internationale. Il faudrait combien de morts et combien de blessés pour que cette instance onusienne sorte de son hibernation ? Lors de l'attaque israélienne au Liban en 2006, le Conseil de sécurité avait fait montre de la même inaction, alors que le nombre de victimes civiles qui tombaient à Beyrouth ou à Tir augmentait chaque jour. Trois ans plus tard et dans des conditions presque similaires, ce Conseil se comporte de la même manière devant le même acteur : Israël. L'Etat hébreu bénéficie de la protection infaillible des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France à travers le droit de veto. Ce n'est pas nouveau ! Les pays arabes ont présenté une résolution non contraignante pour arrêter les bombardements de Ghaza. Aucune suite après un veto américain. Attitude incompréhensible de l'ONU Une autre réunion, sous pression des pays arabes, s'est tenue hier tard dans la nuit à New York. Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe, avait ouvertement attaqué le Conseil de l'ONU pour son attitude incompréhensible eu égard à la gravité de la situation. Si Israël est bien couvert, qui plaide la cause des populations palestiniennes, du monde arabe et, plus largement, du monde musulman ? Personne. La Chine et la Russie n'usent que rarement de leur droit de veto. Donc la présence en tant que membres permanents de cette partie de l'humanité (presque 1 milliard de personnes) devient incontournable. Les Etats-Unis, l'Union soviétique (devenu Russie après son éclatement), le Royaume-Uni, la France et la Chine se sont offerts la qualité de « membres permanents » du Conseil de sécurité car ils ont été les vainqueurs de la Grande guerre et parce que l'élément démographique avait été pris en compte (empire britannique et colonies françaises y compris). Or, les donnes ont bien changé. Les cinq membres permanents ne représentent actuellement que 35% de la population mondiale. Le Royaume-Uni et la France n'ont, théoriquement, plus de place parmi les membres permanents de ce Conseil vu leur faible taux démographique comparé à des pays comme l'Inde, le Pakistan, l'Indonésie, le Bangladesh, le Nigéria, le Japon, le Brésil, le Mexique ou les Philippines. Même l'Allemagne, qui a perdu la guerre, est plus peuplée que la France et le Royaume-Uni. Berlin œuvre depuis plusieurs années à rejoindre le Conseil de sécurité en qualité de membre permanent sans être entièrement soutenu par ses partenaires de l'UE. De même pour le Japon, autre perdant de la guerre, qui rame pour une position similaire sous l'œil soupçonneux des Etats-Unis et de l'UE. La règle de deux poids, deux mesures Pour ce qui est de la dissuasion atomique, citée parfois comme argument, l'Inde et le Pakistan sont des puissances nucléaires autant que le sont les cinq membres permanents actuels. Les blocages nés de l'usage abusif et presque exclusif de ce qui est appelé « droit » de veto doivent motiver la communauté internationale à revoir, de fond en comble, ce système. D'abord, parce qu'il est injuste et déséquilibré. Ensuite parce qu'il a autorisé des massacres intensifs de populations pour des calculs politiques et géostratégiques. Aujourd'hui, maintenir le droit de veto, c'est ouvrir la voix à d'autres conflits, à d'autres cruautés et à l'instabilité de l'ordre mondial. Dans ce cas-là, le Conseil de sécurité, dont la mission est « le maintien de la paix et de la sécurité internationale », n'a plus lieu d'être. Appliquer à chaque fois la règle de deux poids, deux mesures concernant Israël notamment, permet à d'autres pays de violer le droit international sans être comptable de quoi que ce soit. Pour sauver sa crédibilité, le Conseil de sécurité a besoin d'une réforme urgente. En un deux mots : ce Conseil doit ou s'adapter ou disparaître. Il en est de même pour l'autre Conseil, celui des droits de l'homme de l'ONU, qui s'est réveillé presque deux semaines après le début de l'attaque israélienne de Ghaza pour « tenir une session extraordinaire » à la demande des groups arabe, africain et de la Conférence islamique (OCI). La sphère géographique, ethnique et religieuse de ces groupes souligne que quelque chose ne va pas dans le droit international. Pourquoi les pays européens, d'habitude très sensibles aux questions des droits humains, n'ont-ils pas demandé une réunion de ce Conseil ? Là aussi, l'hypocrisie est évidente. En décembre dernier, ce Conseil n'avait trouvé aucune difficulté à se réunir et à dénoncer « les violations des droits de l'homme en République démocratique du Congo (RDC) »...