Poussée à l'inaction, l'ONU ne se prive pas de parler. Elle l'a déjà fait pour rétablir certains faits et dénoncer d'autres. Elle a aussi montré à quel point elle demeurait la mémoire du monde avec une cartographie immuable. Et dire les choses par leur nom, notamment en ce qui concerne le caractère inhumain du blocus imposé aux Palestiniens par Israël. Elle a ainsi démenti, hier, la présence de combattants palestiniens dans une école qu'elle gère dans la bande de Ghaza, où plus de 40 personnes ont été tuées la veille dans une attaque israélienne. Israël a affirmé avoir tiré à l'artillerie en direction de l'école où, selon elle, des combattants palestiniens s'étaient positionnés pour tirer des obus de mortier contre ses forces qui mènent une offensive sans précédent contre ce territoire palestinien, connu pour abriter la plus forte densité humaine au monde. L'ONU se devait de rétablir les faits, comme elle le fait souvent. Ce fut le cas, en 1996, quand l'aviation israélienne avait bombardé un campement de la Finul (force intérimaire des Nations unies au Liban), où des populations civiles avaient trouvé refuge. C'était à Cana. Cent Libanais avaient alors été tués froidement et sauvagement. Comme toujours, Israël dira qu'il s'agissait de combattants. Faux, dira alors l'ONU dans un rapport qui fera date, puisque le secrétaire général de l'ONU (à l'époque, c'était l'Egyptien Boutros Ghali) avait refusé de bloquer ce rapport, ce qui lui coûtera un deuxième mandat à la tête de l'organisation internationale. Cette fois encore, les bâtiments de l'ONU, pourtant dûment identifiés, ne sont pas respectés. Une cible comme les autres pour Israël. Et ceux qui s'y trouvent aussi, quel que soit leur âge. Même des enfants en bas âge. La terreur israélienne s'abat sur tout ce qui est palestinien. « Suite à une enquête préliminaire, nous sommes sûrs, à 99,9%, qu'il n'y avait ni activistes ni activités militaires dans l'école », a affirmé Chris Gunness, le porte-parole de l'agence de l'ONU pour l'aide aux réfugiés palestiniens (Unrwa). « Nous appelons à une enquête indépendante. Si les lois de la guerre ont été violées, les coupables devront être présentés à la justice », a-t-il ajouté. Un cri dans le désert, connaissant l'impunité dont bénéficie Israël, et, dans le cas de ces crimes inqualifiables, toute la complicité au plan international. A l'image de ceux qui veulent pervertir les faits, et faire des Palestiniens les auteurs de cette violence. N'a-t-on pas entendu ainsi un chef d'Etat occidental dire que le Hamas a commis un acte « irresponsable et impardonnable » en menant ses opérations de résistance ? Sauf à croire que ses conseillers font mal leur travail, on dira de lui qu'il s'est au moins trompé en déclarant que ce mouvement a rompu la trêve, alors même qu'elle venait à expiration et qu'Israël l'avait rendue caduque et inutile en lançant son armée contre la bande de Ghaza le 4 novembre dernier. Et ce n'est pas tout en ce qui concerne le mensonge de l'Occident. Effectivement, il n'y a pas eu erreur de tir, mais une action délibérée, puisque deux autres écoles ont subi le même sort presque au même moment. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, qui avait tout juste le droit de déplorer de tels crimes, a souligné que les emplacements de ces écoles, qui servaient de refuges à des Palestiniens rendus sans abri par l'offensive israélienne, « avaient été communiqués aux autorités israéliennes et étaient connus de l'armée israélienne ». « Après les premières frappes, le gouvernement israélien avait été averti du fait que ses opérations mettaient en danger les locaux de l'ONU. » « Tous ces efforts n'ont pas empêché la tragédie d'aujourd'hui, et j'en suis profondément consterné. Ces attaques par les forces israéliennes, qui mettent en danger des installations de l'ONU utilisées comme refuges, sont totalement inacceptables et ne doivent pas se reproduire », a ajouté le chef de l'ONU. C'est à son honneur de rétablir les faits. C'est le moins qu'il pouvait faire, alors que l'organisation qu'il dirige sombre dans le discrédit. Des pays en ont fait un instrument de guerre, et rien d'autre. Elle est devenue une machine à produire des résolutions contre tous ceux qui ne sont pas couverts par le rapport de forces actuel. Quant aux autres, et là ce sont ce qu'on considère, sans risque d'erreur, comme les causes justes, sont marginalisées, sinon combattues. Dire alors que l'ONU cultive l'injustice, quelle aberration. Mais c'est cela la vérité. Une bien triste vérité. Cana comme Deir Yassine ne sont pas des faits isolés.