Fini le temps où Alger était la « qibla » des mouvements indépendantistes, fini le temps où Alger était un passage obligé pour les révolutionnaires du monde. Alger est désertée, Alger est boycottée, Alger est à l'écart du monde. La guerre sans merci lancée sur le territoire de Ghaza par un Etat sioniste affichant au monde, sans honte, sa face immonde, a levé le voile sur une diplomatie algérienne effacée et falote. La capitale, qui a vu s'établir l'acte de naissance de l'Etat palestinien, campe aujourd'hui le rôle d'un observateur qui dénonce sans se montrer très concerné par le massacre que subissent des centaines de civils palestiniens. Que fait l'Algérie contre cette incessante agression sur ce corps meurtri ? Pas grand-chose. Son Président plonge dans un silence pesant, sa diplomatie se contente de dénonciations sporadiques via les médias et son peuple est soumis au diktat de l'interdiction des marches. Est-ce là la position attendue de « l'Algérie des révolutionnaires » ? Le silence du président de la République, lui qui faisait de son retour aux affaires en 1999 un pari pour le retour de l'Algérie sur la scène internationale, a sonné comme une régression dans le soutien traditionnel de l'Algérie aux côtés de la Palestine. Même des Etats arabes qui ont pourtant des relations avec Israël ont réagi. L'Algérie n'a pourtant pas de quoi rougir face à la question palestinienne, contrairement à certains Etats arabes qui sont carrément accusés de complicité avec Israël. Même le président tunisien Ben Ali a été vu en tête d'une marche de soutien aux Palestiniens. Pour défendre le président Bouteflika, Belkhadem affirme qu'il n'est pas resté inerte et qu'il a téléphoné à des chefs d'Etat. Pourquoi tant de mystère ? Dans une situation comme celle qui prévaut en Palestine, un Etat, qui plus est membre de la Ligue arabe, se doit d'avoir une position claire et l'exprimer de la manière la plus ferme et transparente. Si l'Algérie opère une action diplomatique, pourquoi ne pas la rendre publique, cela ne ferait que la grandir aux yeux de l'opinion nationale et internationale. Qui sont ces chefs d'Etats contactés et quelle a été la démarche entreprise par l'Algérie ? Pourquoi donc ce silence énigmatique ? Tant de questions que tout le monde est en droit de se poser et qui nous poussent à nous demander si la prochaine échéance électorale y est pour quelque chose. Est-ce là une raison suffisante pour se taire sur un génocide qui s'opère au vu et au su de la communauté internationale au nom de la sauvagerie. Chérissant pourtant le portefeuille diplomatique, Abdelaziz Bouteflika a choisi l'absence d'une scène internationale foisonnant de chassés-croisés d'hommes d'Etat cherchant à placer leurs pays sur l'échiquier des interlocuteurs qui comptent. Pendant ce temps, l'Algérie continue de perdre du terrain diplomatique. Son absence de la réunion des ministres des Affaires étrangères arabes avec les membres du Conseil de sécurité, à New York, renseigne sur la faiblesse de sa diplomatie. Pis encore, la position algérienne est exprimée différemment par deux membres du gouvernement. Le Premier ministre dit que l'Algérie est favorable à la tenue d'un sommet des pays arabes, alors que le représentant du chef de l'Etat estime que l'Algérie n'a que faire d'un sommet qui n'apporte rien à la question palestinienne. La diplomatie algérienne semble avoir troqué sa fermeté d'antan pour une politique à deux vitesses qui prône deux discours, l'un à consommation nationale et l'autre livré au monde sans, semble-t-il, s'attendre à produire un impact. Convoquer les ambassadeurs des pays membres du Conseil de sécurité, rappeler que l'Algérie n'a pas de relations avec Israël, envoyer des denrées alimentaires et autres médicaments à Ghaza n'est pas la position que mérite d'avoir l'Algérie. La cause palestinienne mérite une approche plus empreinte de sérieux de la part de son allié traditionnel. Si Ghaza est doublement martyre, à la fois de la guerre injuste imposée par la colonisation israélienne et de son sacrifice sur l'autel d'une chimère appelée « union arabe », elle ne peut être de surcroît lâchée par ses alliés. Heureusement que la rue algérienne a forcé les interdits pour sauver l'honneur de l'Algérie et prouver à Ghaza sa franche solidarité.