La Russie et l'Ukraine ne cessent de s'adonner à un sempiternel échange d'accusations, tandis que l'Europe hausse le ton à nouveau et menace de recourir à la justice. Ainsi, lassée du chaud et du froid des Russes, l'Union européenne a brandi hier la menace d'actions en justice contre la Russie et l'Ukraine, faute de reprise très rapide des livraisons de gaz, estimant que les deux pays ne pouvaient plus se cacher derrière des problèmes techniques. Le président de l'Exécutif européen, José Manuel Barroso, a jugé que « la Russie et l'Ukraine montrent qu'elles sont incapables de respecter leurs engagements envers certains Etats membres » et que cette situation est devenue « inacceptable et incroyable ». Faute de volonté politique d'honorer l'accord, poursuit M. Barroso, la Russie et l'Ukraine « ne pourront plus être considérées comme des partenaires fiables pour la fourniture d'énergie ». José Manuel Barroso a conclu son discours prononcé au Parlement européen de Strasbourg ainsi : « Il y a des contrats entre Gazprom et certains pays européens » et « l'Ukraine a signé et ratifié la Charte de l'énergie, donc il y a des obligations internationales. Et si elles ne sont pas remplies, il y a bien entendu la possibilité d'actions en justice pour les compagnies ou les pays membres, que Bruxelles recommandera s'il n'y a pas de résolution rapide. » Les déclarations du président de l'Exécutif européen traduisent un vif désarroi qui anime les Etats de l'UE. La crise perdure depuis maintenant deux semaines, affectant fortement l'Europe centrale et l'Europe de l'Est ainsi que certains Etats de l'Ouest de l'UE. La vie quotidienne et économique était perturbée dans ces régions après les coupures de gaz russe via l'Ukraine. En attendant une reprise des livraisons qui n'a que trop duré, les deux antagonistes, l'Ukraine et la Russie, s'échangeaient encore des accusations, tenant en otages les clients européens. Le Premier ministre russe Vladimir Poutine, qui s'est investi pleinement dans cette affaire, a accusé hier l'Ukraine de « prendre en otages d'autres pays » en profitant de son rôle dans le transit du gaz russe vers l'UE. Vladimir Poutine, s'exprimant au cours d'une rencontre avec ses homologues bulgare, moldave et slovaque à Moscou, a appelé la Commission européenne à « user de son influence sur l'Ukraine pour assurer l'approvisionnement en gaz ». De son côté, Kiev a affirmé que le groupe gazier russe Gazprom cherchait à ternir l'image de l'Ukraine en tant que pays de transit fiable, en choisissant un itinéraire « impossible » pour transporter le gaz vers l'Europe. Le vice-ministre ukrainien des Affaires étrangères, Kostiantyn Elisseïev, a accusé Gazprom d'avoir « sciemment choisi un itinéraire d'acheminement de gaz techniquement impossible pour montrer l'incapacité des gazoducs ukrainiens de transporter le gaz russe et nuire à l'image de l'Ukraine ». Face à cet échange de tirs qui n'en est pas à son premier épisode, l'Union européenne semble décidée à ne pas y aller avec le dos de la cuillère. Pour sauver la face, le président russe Dmitri Medvedev a proposé la tenue d'un sommet à Moscou regroupant toutes les parties concernées.