La Russie a finalement mis, hier, à exécution sa menace de couper la fourniture en gaz à l'Ukraine si cette dernière n'acceptait pas les nouveaux tarifs de vente de ce produit. Cette coupure a été confirmée par la compagnie ukrainienne, qui a fait état d'une baisse de pression. Le président russe, Vladimir Poutine, avait en effet donné un ultimatum (samedi 31 décembre à minuit) à l'Ukraine, qui refusait l'augmentation du prix du gaz pour l'année 2006. Moscou avait demandé l'alignement du prix sur celui du marché, à savoir 220-203 dollars le millier de mètres cubes, contre 50 dollars auparavant. Ce dernier prix étant considéré comme politique puisque subventionné. Tôt dans la matinée d'hier, la compagnie russe Gazprom a annoncé avoir lancé le processus d'arrêt de ses livraisons de gaz à l'Ukraine, tout en rassurant les autres clients européens, approvisionnés par le réseau de canalisations qui passent par l'Ukraine. En milieu de journée, un porte-parole de la compagnie ukrainienne Naftogaz a confirmé la coupure. L'Ukraine avait refusé l'augmentation en demandant une hausse graduelle. Moscou avait offert un sursis de trois mois si l'Ukraine s'engageait à accepter les nouveaux tarifs. Selon plusieurs observateurs, ce conflit commercial cache, en réalité, un conflit politique, après que l'Ukraine eut pris ses distances avec Moscou suite au changement de régime, intervenu il y a une année, et projetté d'adhérer à l'OTAN. L'ancien prix du gaz facturé par Moscou à Kiev pouvait être considéré comme un « prix d'ami ». Si des observateurs voient dans la demande russe une volonté d'affaiblir le pouvoir pro-occidental en Ukraine, pour le gouvernement russe, le pouvoir ukrainien a rompu en toute conscience les négociations et utilise le problème gazier pour créer une image de l'ennemi, à l'approche des élections législatives. Cette coupure pose un problème dans la mesure où l'Europe est approvisionnée depuis le réseau qui passe par l'Ukraine et Gazprom accuse déjà Kiev de prélever, de ses gazoducs, du gaz russe en transit, à destination de l'Europe occidentale. La Russie est le principal exportateur de gaz vers l'Europe (près du quart des importations européennes) aux côtés de l'Algérie et de la Norvège. L'Ukraine était approvisionnée en gaz russe à hauteur de 25 milliards de mètres cubes par an. Elle vient de signer un accord avantageux avec le Turkménistan pour l'achat de 40 milliards de mètres cubes par an, en 2006, pour un prix d'environ 60 dollars le millier de mètres cubes.