Pas de plan de paix au Proche-Orient sans partage de Jérusalem. Cette position, conforme aux demandes des Palestiniens et aux paramètres de règlement du conflit défendus par la Ligue arabe et les grandes capitales européennes, vient d'être réaffirmée par l'Arabie Saoudite. Riyad regrette justement que ce paramètre ait été ignoré par le plan de paix américain. Inattendu retournement de situation au Proche-Orient. Alors que tout le monde croyait jusque-là qu'elles allaient soutenir les yeux fermés le plan de paix au conflit palestino-israélien concocté par l'administration Trump, les autorités saoudiennes ont surpris tout le monde arabe cette semaine en rejetant l'approche américaine. Plus que cela, le roi Salmane Ben Abdelaziz Al Saoud a fait savoir, dans une lettre à son allié américain, qu'il rejetterait tout processus de paix qui ne reconnaîtrait pas Jérusalem-Est comme capitale du futur Etat palestinien et n'aborderait pas la lancinante question des réfugiés palestiniens. Position que partage aussi la majorité des pays arabes. Ainsi qu'il fallait s'y attendre, la sortie saoudienne n'a pas été du goût de Tel-Aviv qui comptait beaucoup sur l'adhésion de Riyad à la feuille de route américaine. Aussi, la presse israélienne a été unanime, mardi, pour considérer que le roi Salmane Ben Abdelaziz Al Saoud a définitivement enterré ce que le président américain a présenté, ces derniers mois, comme étant «l'accord du siècle». Le journal Ma'ariv, l'un des trois plus grands quotidiens d'Israël, considère à ce propos que l'Arabie Saoudite a tué le projet de l'administration américaine d'imposer son plan de paix au Proche-Orient, indiquant que la lettre envoyée par le roi Salman Ben Abdelaziz Al Saoud à la Maison-Blanche, dans laquelle il exprime son rejet de «l'accord du siècle» a frustré le président américain, Donald Trump, qui pensait que Riyad était un allié de Washington. La même source rapporte également que la position de l'Arabie Saoudite a permis de sortir le président palestinien, Mahmoud Abbas, et l'Autorité palestinienne – qui avaient qualifié «l'accord du siècle» de «claque du siècle» – de leur isolement, surtout que d'autres pays arabes ont emboîté le pas à Riyad. MBS désavoué Shlomo Shamir, l'analyste politique du journal, estime aussi que la lettre saoudienne signifie la fin de «l'accord du siècle», faisant remarquer toutefois qu'elle n'était pas une déclaration officielle. Mais il reconnaît tout de même qu'elle a valeur de déclaration officielle. Et qu'il fallait donc la prendre au sérieux. Des sources diplomatiques, citées par des médias russes, ont confirmé que le roi Salmane était le principal décideur saoudien concernant les dossiers du Moyen-Orient et qu'il a donné des garanties fermes pour soutenir le président palestinien Mahmoud Abbas. Autrement dit, le prince héritier Mohammed Ben Salmane, dit «MBS», qui s'est illustré ces dernières semaines par son activisme diplomatique, est sur la touche concernant le conflit palestino-israélien. Fin 2017, de nombreuses sources diplomatiques avaient rapporté que MBS avait donné sa caution au plan de paix préparé par l'homme d'affaires Jared Kushner, le gendre de Donald Trump, en quête de «l'accord ultime» sur ce dossier phare. En ce sens, les observateurs pensent que le roi de l'Arabie Saoudite a désavoué le prince héritier sur la question d'El Qods. Selon plusieurs sources, les autorités saoudiennes n'auraient particulièrement pas apprécié que le président américain ait décidé de reconnaître, de manière unilatérale, Jérusalem comme capitale d'Israël. «En Arabie Saoudite, c'est le roi qui décide sur ce sujet, maintenant, et non le prince héritier», a confié un diplomate arabe de haut niveau à l'agence Reuters, à Riyad. «L'erreur des Etats-Unis a été de penser qu'un pays seul pourrait forcer les autres à céder. Mais il ne s'agit pas de pression. Aucun dirigeant arabe ne peut faire de concessions sur Jérusalem ou la Palestine», a-t-il ajouté.