Pour le président de l'Ordre des médecins, le Dr Bekkat Berkani, la nouvelle carte sanitaire est un «véritable problème» qui va favoriser la ventilation du corps paramédical et médical, notamment les spécialistes, vers le privé. Malgré tous les débats et les critiques qu'elle a suscités, la nouvelle loi relative à la santé a été adoptée et publiée au dernier Journal officiel. Même si cette publication représente pour ce nouveau texte une entrée en vigueur officielle, son application reste tributaire des textes y afférents et de beaucoup d'efforts. Considérée par l'Ordre des médecins comme une avancée positive pour le secteur, cette loi reste tout de même lourdement critiquable. «La loi est aujourd'hui là et elle aurait gagné à être plus consensuelle. Dans l'impossibilité de la changer, on espère que les responsables du secteur auront la clairvoyance de faire participer les professionnels de la santé dans l'établissement des textes d'application. En tant qu'Ordre des médecins, nous souhaitons vivement participer à cette étape cruciale comme nous l'avons fait lors de la mise en place de la commission d'installation des médecins privés», dit le Dr Bekkat Berkani, président de l'Ordre des médecins. Ce que certains considèrent comme une dissension dans le secteur de la santé, notre interlocuteur l'aborde d'un point de vue positif en parlant de décentralisation. Pour lui, cette nouvelle loi sanitaire est novatrice dans ce volet ainsi que dans la relation du corps médical et paramédical avec l'administration et dans l'octroi de plus d'importance au privé. Il reste toutefois sceptique quant à la notion de complémentarité citée dans l'article 15 de ce nouveau texte. «La complémentarité reste une notion théorique étant donné que les deux secteurs, privé et public, ne se ressemblent pas sur plusieurs points, à l'instar de la catégorie sociale des patients et la finalité des soins qui est payante chez le privé et normalement gratuite dans les établissements publics. Dans ce dernier volet, la gratuité en l'occurrence, il est aujourd'hui obligatoire de faire actionner les différents mécanismes de sécurité sociale pour la rendre réelle même s'il est demandé au patient de payer», explique-t-il. Autre point de débat, la nouvelle carte sanitaire qui supprime les Etablissements publics de santé de proximité (EPSP) et les Etablissements publics hospitaliers (EPH) et divise le secteur en régions et districts sanitaires. Pour le président de l'Ordre des médecins, cette nouvelle carte est un «véritable problème» qui va favoriser la ventilation du corps médical et paramédical, notamment les spécialistes, vers le privé. Pour le Dr Bekkat, il est nécessaire aujourd'hui de mettre en place des motivations, notamment financières, pour éviter ce drame. De plus, selon ses propos, une carte sanitaire n'est pas une carte d'état-major où le médecin est un soldat. «Ce dernier a besoin de plus de considération pour rester dans le secteur public», conclut-il. En attendant sa mise en application sur le terrain à travers des décrets d'exécution, la loi sanitaire restera, malgré toutes les nouveautés qu'elle apporte, en deçà des attentes du corps médical et paramédical sur plusieurs points, sauf si les textes d'application apportent une meilleure pratique de cette loi sur le terrain.