Quelles sont les principales causes de la désertification qui touche la zone sud de la wilaya de Bouira ? Les causes sont à la fois naturelles et anthropiques (causées par l'homme). La partie sud de la wilaya de Bouira- particulièrement les communes de Taguedite, Hadjra Zerga, Dirah, Maâmora et Ridane- est située dans le couloir des Hauts Plateaux- lequel va de la frontière tunisienne à la frontière marocaine sur 1500 km, zone connue pour sa faible pluviométrie, à la limite de l'aridité (200 mm/an), alors que dans la partie nord, à Saharidj par exemple, on atteint jusqu'à 1200 mm/an. La faiblesse de la pluviométrie, ajoutée à la forte amplitude thermique, c'est-à-dire la différence de température entre l'hiver et l'été, et entre le jour et la nuit, génère un type de végétation steppique, faite d'alfa, de sparte, d'armoise, de diss et autres plantes adaptées à la sécheresse et évoluant sur un sol squelettique. A ces raisons naturelles se greffent des causes humaines, liées au système de l'économie locale, basée essentiellement sur l'élevage ovin extensif (voué au pâturage sur les terres de parcours) et la surexploitation de terrains fragiles en céréaliculture. Le surpâturage vient à bout de l'offre fourragère, déjà fort modeste, et la céréaliculture, inadaptée sur ces terres, déstructure le sol. Ces deux phénomènes, dans un contexte de pluies orageuses, principalement en automne, et de sirocco, induisent une éolienne hydrique et une éolienne du sol, lui faisant perdre sa structure, sa texture, ses sels minéraux et sa matière organique. Autant dire que le sol est devenu quasi stérile. A une latitude plus au nord, les raisons du phénomène de la désertification sont aussi liées aux différentes agressions dont souffre le patrimoine forestier (incendies, défrichements,...). Quel impact pourrait avoir cette situation ? Les retombées négatives d'une telle situation sont déjà constatables sur le terrain et risquent de s'amplifier si les programmes développés jusqu'ici par les pouvoirs publics dans ces régions ne sont pas consolidés et améliorés sur le plan qualitatif. La réduction de l'offre fourragère, la crise cyclique vécue par les éleveurs ovins, la diminution des rendements agricoles, la raréfaction de la ressource hydrique, la chute des revenus des ménages, la déscolarisation précoce des enfants et, enfin, la vraie désertification, celle du départ des populations vers les villes. Est-ce que les programmes mis en place par l'Etat sont suffisants pour lutter contre ce phénomène ? Les programmes mis en œuvre par l'Etat au cours des vingt dernières années pour lutter contre la désertification ont mobilisé des enveloppes financières conséquentes. Les résultats sont significatifs, sans être complètement suffisants. Probablement, l'un des indices les plus parlants demeure le retour des populations vers leurs hameaux d'origine après plus d'une décennie d'«expatriation» dans les villes. Ce retour est perceptible un peu partout, à tel point que de nouveaux besoins sociaux ont vu le jour, créant de nouvelles pressions, inconnues jusqu'ici, sur les APC et les autorités administratives. Les projets de développement rural, outre les PCD et les plans sectoriels, ont pu créer une nouvelle attractivité dans les territoires naguère boudés ou désertés. Les activités d'arboriculture, d'apiculture, de petit élevage, d'artisanat, soutenues par des fonds publics, ont été renforcées avec des projets de reboisement, de plantation de brise-vents, de plantations fourragères, de mobilisation de ressources hydriques (par des ouvrages divers : retenues collinaires, aménagement des sources, forages, canaux de dérivations, mares,...). Ce sont là des investissements qu'il y a lieu, non seulement de poursuivre, mais dont aussi il faut améliorer la qualité. Comment peut-on contrer son avancée ? Je crois que les programmes initiés jusqu'ici par les pouvoirs publics -pilotés par l'administration des forêts, les services agricoles et le Haut Commissariat au développement de la steppe- sont le résultat d'un diagnostic objectif de la situation. Reste à trouver les méthodes et les formules à même de rendre plus pertinente et plus efficiente l'intervention de tous les acteurs (institutionnels, techniques et sociaux) sur le terrain. C'est surtout cette synergie qu'il y a lieu de mettre en place, afin de faire adhérer au maximum les populations aux projets de lutte contre la désertification.