Il ne sera resté que 16 mois. Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire dans le gouvernement français, a jeté l'éponge hier matin. Il a annoncé sa démission à la surprise générale. Estimant qu'Emmanuel Macron n'a pas fait grand-chose pour l'environnement, il a préféré se retirer plutôt que d'avaler d'autres couleuvres. L'ancien producteur de l'émission sur l'environnement et la nature «Ushuaia» a surpris tout le monde en annonçant directement sa démission sur les ondes de France Inter. Personne n'était au courant, y compris le président Macron, qui fait face à un deuxième couac politique majeur après le scandale d'Alexandre Benalla. «Je ne peux plus mentir. J'ai souffert durant les douze derniers mois en tant que ministre. Je ne peux pas mentir sauf à basculer dans un comportement cynique», a expliqué M. Hulot, qui a décidé de «ne plus s'engager en politique». Et d'ajouter : «Je ne regrette pas d'avoir accepté de devenir ministre, mais je n'avais peut-être pas les épaules pour cela.» Nicolas Hulot a affirmé avoir profité de ses deux semaines de vacances pour mûrir sa décision. Il a jugé que le président Macron, «malgré les discours, n'était pas vraiment engagé dans la lutte contre le réchauffement climatique et la protection de l'environnement». «J'espère qu'il tirera les leçons (de ma démission). J'espère que ce geste sera utile, pour que chacun se pose la question de sa responsabilité.» Il a reproché au gouvernement d'Edouard Philippe de ne faire que des «petits pas» en ce qui concerne la transition écologique et la protection de l'environnement. «On s'évertue à entretenir un modèle économique qui est la cause de tous ces désordres climatiques. Nous faisons des petits pas et la France en fait beaucoup plus que d'autres pays, mais est-ce que les petits pas suffisent ? La réponse est non.» «Je me suis dit que c'était le moment d'arrêter.» Donné démissionnaire depuis plusieurs mois, M. Hulot a avoué qu'il se sentait «tout seul à la manœuvre» sur les enjeux environnementaux au sein du gouvernement. Et de déplorer que son poste était «à la croisée des lobbys. Parce que les lobbys sont là». Interrogé sur la manière dont il avait vécu ses 16 mois au gouvernement, Il a répondu : «Puisque je suis dans un moment de vérité, sauf à basculer dans ce que j'allais devenir, c'est-à-dire cynique. Je me suis surpris à des moments à abaisser mon seuil d'exigence et là je me suis dit c'est le moment d'arrêter.» La démission de Nicolas Hulot intervient également au lendemain de la rencontre qui a eu lieu entre Emmanuel Macron et le président de l'Association des chasseurs français. Un lobby très puissant, proche de la droite et qui compte plusieurs milliers d'adhérents. Pour tenter de remonter un peu plus dans les sondages (le dernier le donne à 34% de satisfaits), Emmanuel Macron a accepté de réduire de moitié (de 400 euros à 200) le prix de l'abonnement annuel que doit payer tout chasseur. Aussi, il n'a pas réussi à limiter le nombre de bêtes sauvages et d'oiseaux à chasser. Alors qu'en Europe, les chasseurs n'ont droit de chasser que 14 espèces, en France, ce nombre atteint les 60 espèces. Est-ce la goutte qui a fait déborder le vase de Nicolas Hulot ? Une chose est sûre, ce dernier ne s'est jamais bien senti dans un gouvernement «contradictoire» qui ne fait pas grand-chose pour «protéger la nature» et favoriser une «agriculture biologique et propre». Alors que les rumeurs le donnaient démissionnaire depuis au moins trois mois, Nicolas Hulot a continué à avaler les couleuvres, car ne voulant pas déstabiliser le président français. Mais la patience a des limites. Visiblement ne se sentant pas utile ni écouté par le gouvernement ni par le Président, le père d'«Ushuaia» a préféré claquer la porte, compliquant de facto la rentrée, déjà contrariée, d'Emmanuel Macron.