Bienvenue dans les champs cultivés de Da Moh, l'agriculteur de la localité de Aïn Meziav, à 7 km de Tizi Ouzou. Mohamed Bouali enfilant sa combinaison de fermier, pour entamer sa véritable passion, celle de servir la terre nourricière, une vie réglée au rythme de l'agenda floral, un espace ceinturé de roseaux et de cactus qu'il occupe dès les premières lueurs du jour, tutoyant arbres et plantes. Il respire à pleins poumons le zéphyr matinal émanant des artères du mont de Sidi Ali Bounab. Mohamed Bouali, ancien retraité de la Société nationale du plastique de Sétif, a retrouvé son bonheur au sein de son jardin dit «Elancer», un site gorgé d'eau et fleuri de mille et une plantes, des familles des herbacés, des rosacés et des rutacés. La récoltes de cet été est un peu décevante, du fait des intempéries du mois de mai dernier, les rafales de vent ont endommagé les produits sous serres. La persévérance de Monsieur Botanique à faire face aux aléas de la nature a redonné à la terre son potentiel résistant et sa solidité. Un autre élément ravageur des arbres fruitiers, l'insecte dit «puceron vert» a détruit des pommiers, des poiriers, des grenadiers, des citronniers, ainsi que d'autres récoltes de saison . La formule magique du gardien des lieux pour lutter contre ces phénomènes se résume en un usage rationnel et espacé des insecticides. Par ailleurs, d'autres ripostes existent, à savoir une plantation d'aromatiques, comme la lavande, le thym et la menthe poivrée, sans oublier le lâcher de coccinelles, qui sont en fait en voie de disparition. La cause est bien évidement le réchauffement climatique. Mohamed Bouali a toujours prodigué de bons conseils aux enfants du village concernant la protection des animaux, y compris les insectes, il y va de l'équilibre écologique et de la survie des espèces. L'olivier demeure son arbre de prédilection, un arbre méditerranéen par excellence, son travail de taille et de greffage a sauvé plusieurs variétés des intempéries, la sauvegarde de l'oliveraie est l'une des grandes satisfactions de Da Moh. De bonnes prévisions de récoltes en quantité et en qualité d'huile d'olive lui font oublier les mauvais résultats de cette année. Un autre symbole célébrant la mare nostrum, le figuier, cet arbre fruitier qui a résisté aux morsures des bestioles, a livré pour la fin du mois d' août deux variétés de figues, avujarnih et taganimt, un succulent fruit bercé par la brise du matin.Tabaxsist titille le palais et redonne de l'eau à la bouche. Da Moh, le regard vif, les cheveux coiffés d'une casquette bcbg, le pas haletant, cet intellectuel vert vulgarise auprès des siens les grands débats sur l'agriculture biologique et solidaire. Il regrette le manque de fumier faute d'élevage et il rappelle les bons gestes liés a la préparation de la terre, la préservation des semences locales et le respect de l'horloge florale, toute un savoir pour amadouer Dame nature et honorer les cycles des saisons. Les cérémonies relatives a la cueillette des olives illustrent parfaitement cette fusion de toute une procession de femmes, avec une nature belle et féconde. On ne peut quitter le verdoyant Aïn Méziav sans enrichir notre lexique agraire et saisir les vertus médicinales des plantes comme l'inule ou le maghramane en kabyle, la lavande ou amezir, le vechma ou le sorgho, la bourache ou ccix levqul et la liste est longue. Ce rapport sain à la terre se manifeste également par cette générosité de M.Bouali et cet amour sans égal à Tamurt, la tomate cerise est son produit de niche qui gagnerait à être distribué dans les commerces et les grandes surfaces de la région et ses alentours. Une agriculture de proximité serait une solution miracle pour mettre fin aux cycles de spéculation et au diktat du monopole de la distribution et du stockage. Du champ à la table, sans aucun intermédiaire, donnerait plus de goût à nos plats et amortira ainsi nos bourses. Last but not least, et nous voilà attablés autour d'une petite meïda pour apprécier la nourriture gourmande issue de jardin, ou tabhirt, de M. Bouali, une rencontre conviviale narrant le succès story d'un senior qui a fait de son activité agricole une excellente thérapie.