Washington dépêche ce week-end à Munich (sud de l'Allemagne), une délégation menée par le vice-président Joseph Biden, pour donner un aperçu de la nouvelle politique étrangère des Etats-Unis, qu'un réchauffement avec la Russie pourrait illustrer. La Conférence internationale sur la sécurité, qui se tient chaque année à Munich, devrait également permettre aux Etats-Unis de marquer la priorité qu'ils entendent donner désormais à l'Afghanistan, au risque d'embarrasser des alliés européens moins enthousiastes. M. Biden, ancien sénateur spécialiste des questions de politique internationale, sera accompagné du général James Jones, conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche, de Richard Holbrooke, envoyé spécial au Pakistan et en Afghanistan et du général David Petraeus, commandant les forces militaires américaines de la Méditerranée à l'Afghanistan. Parmi les 300 participants à la conférence figurent la chancelière allemande Angela Merkel, le président français Nicolas Sarkozy, favorable à un rapprochement de la France et de l'Otan ainsi qu'à un développement de l'Europe de la défense. Selon Alexander Rahr, spécialiste de la Russie au Conseil allemand sur les affaires étrangères (DGAP), Munich offre à Washington et à Moscou l'occasion d'ébaucher un premier rapprochement après l'ère Bush. La Russie devait être représentée par son premier vice-Premier ministre Sergueï Ivanov, mais le magazine allemand Spiegel spécule sur la possibilité d'une participation de dernière minute du président russe, Dmitri Medvedev. Il y a deux ans, le président russe, Vladimir Poutine, était venu à Munich dénoncer en termes très vifs la politique jugée agressive et unilatérale des Etats-Unis dans le monde. « Si Medvedev décide de se rendre à Munich, j'interpréterai cela comme significatif de l'intention de la Russie de se raccommoder avec l'occident », notamment après le conflit géorgien d'août, a dit M. Rahr. De son côté, la nouvelle administration américaine du président Barack Obama pourrait annoncer, à Munich, un moratoire sur l'implantation de son bouclier antimissile en Europe, selon l'analyste allemand. Josef Janning, politologue à la fondation Bertelsmann, acquiesce : « Ce que l'ancien président américain Bill Clinton a fait concernant l'IDS (Initiative de défense stratégique) de Reagan, Obama pourrait le faire pour le bouclier antimissile », a-t-il estimé, se référant à l'abandon du projet « guerre des étoiles » du président Ronald Reagan, un républicain comme George W. Bush. Le président du parlement iranien, Ali Larijani, sera également présent à Munich. Il a averti qu'il n'entendait pas avoir d'entretiens avec les Américains, bien que les controversés programmes balistique et nucléaire de son pays doivent être abordés par la conférence, alors que Téhéran a mis sur orbite, lundi, son premier satellite. Moscou est farouchement hostile à ce projet de bouclier que Washington affirme destiner à se protéger des futurs missiles iraniens. Il prévoit des missiles d'interception en Pologne, couplés à un radar en République tchèque. L'Afghanistan aussi devrait être au centre des débats. M. Obama a promis de faire de ce pays une priorité, en y dépêchant de 20 000 à 30 000 soldats supplémentaires pour tenter d'enrayer la montée en puissance des talibans. A Munich, les Etats-Unis pourraient appeler leurs alliés à envoyer eux aussi des renforts, initiative qui a peu de chance d'être bien accueillie.