Encore une fois, la commémoration de la mort de Fernand Iveton, guillotiné par les autorités coloniales le 11 février 1957 à la prison de Serkadji, risque d'être compromise par la bêtise et le sectarisme de bureaucrates zélés obéissant à des « ordres venus d'en haut ». La famille, les amis de Iveton, des moudjahidine et des citoyens se préparent à rendre hommage à Fernand et aux deux autres chouhada, Mohamed Ounnouri et Ahmed Lakhnache exécutés le même jour, se sont vu exiger une autorisation de la wilaya d'Alger pour pouvoir se recueillir sur la tombe de Iveton au cimetière chrétien de Bologhine. Comme l'an dernier, à la différence que cette année, la famille du chahid Iveton refuse de se plier à ce qu'elle considère comme une intolérable discrimination, ses compagnons et les moudjahidine sont décidés à passer outre. Pour rappel, le ministre délégué aux Collectivités locales, Daho Ould Kablia, avait tenu à présenter des excuses officielles à la sœur de Fernand après que les autorités avaient fait croire comme étant une simple incompréhension, liée à des considérations sécuritaires, etc. Aujourd'hui, la famille, les amis, les compagnons et les moudjahidine du chahid Iveton ne comprennent pas cette attitude discriminatoire de l'administration alors qu'ils ont, par ailleurs, rendu hommage à d'autres chouhada sans aucun préalable exigé de la part de l'administration. Iveton était assurément loin de penser après avoir crié au pied de la guillotine : « Tahia El Djazaïr » que, quarante-sept ans après l'indépendance de l'Algérie, son sacrifice dérangerait quelque part les satrapes et autres thuriféraires du pouvoir depuis 1962. A l'instar de cet épisode tragi-comique où répondant à un article de l'historien français, Jean-Luc Einaudi, publié dans les années 1980 dans le journal Le Monde, consacré à Iveton et tous ces Français qui ont combattu dans les les rangs du FLN pour l'indépendance, dénonçant par la même « l'oubli officiel » des autorités après 1962 qui ne songèrent même pas à baptiser une rue ou une place publique du nom de ces chouhada. Répondant à l'article du Monde, la kasma FLN et l'APC d' El Madania, ex-Clos Salembier, où est né Iveton, se sont empressées le jour-même — ou plutôt dans la nuit — d'apposer une plaque portant le nom d'Iveton à l'entrée de l'impasse de 30 m où se trouve encore le domicile où il est né. Les auteurs de cette mascarade ont vite fait d'envoyer un démenti au Monde avec photo à l'appui. La manœuvre n'a dupé personne encore moins les citoyens de la commune d'El Madania dégoûtés par la mesquinerie des militants locaux du FLN. Une vingtaine d'années plus tard, les mêmes pratiques sectaires et d'exclusion persistent et suscitent encore plus d'indignation. Faut-il encore signaler que le compagnon de Iveton, Felix Colozi, déchu de sa nationalité algérienne en 1965 pour ne pas avoir soutenu le coup d'Etat contre Ben Bella, attend toujours sa réintégration, malgré ses multiples démarches auprès des autorités.