Une centaine de personnes se sont retrouvées jeudi dernier au cimetière chrétien de Bologhine, à Alger, pour honorer la mémoire du chahid Fernand Iveton, guillotiné le 11 février 1957 par l'administration coloniale. Parmi l'assistance, étaient présents d'anciens compagnons du chahid d'anciens condamnés à mort, des moudjahidine, à l'instar du commandant Azzedine, d'anciens ministres, dont Kamel Bouchama, Abderrazak Brerhi ou encore Abdellaziz Rahabi, des personnalités de la société civile et de nombreux citoyens. Cette initiative est le fait, faut-il le préciser, de citoyens d'El Madania, qui ont tenu à rendre ainsi hommage au sacrifice d'un enfant de la commune. Quant aux compagnons du chahid parmi lesquels Félix Collozi ou Georges Accompora, ils ont tenu à apporter leur témoignage personnel à propos de l'engagement de Fernand Iveton et de ces Français d'origine européenne à la cause nationale. Pour le frère d'un autre chahid Siméon, lui-même insoumis, qui préféra, dit-il naturellement, l'insoumission plutôt que de combattre les Algériens, la question de l'engagement ne se posait pas à l'époque. Félix Collozi qui fut déchu de sa nationalité algérienne, pour avoir refusé de soutenir le coup d'Etat de Boumediène du 19 juin 1965 et qui attend toujours d'être réintégré dans sa nationalité, aujourd'hui septuagénaire, refuse pudiquement d'en parler et vit toujours dans son quartier populaire. Il insistera pour dire combien l'engagement aux côtés de ses frères combattants du FLN était fort et faisait de lui et de tous les autres des Algériens à part entière. Une conviction qui ne pouvait que recueillir, dans ce moment d'émotion, l'approbation du commandant Azzedine et de tous les moudjahidine venus se recueillir sur la tombe de Fernand Iveton, dont les dernières paroles au pied de la guillotine furent : « Tahia El Djazaïr. » Ils n'attendaient rien en retour, tint à préciser à un citoyen d'El Madania Mohamed Chertouk, pas même quand l'Etat algérien oublie de rendre hommage à ceux qui y ont sacrifié leur vie. Et de rappeler les conditions rocambolesques dans lesquelles les responsables de la commune, où a grandi Fernand, se sont empressés, poussés par le parti FLN et les autorités, de baptiser dans la nuit l'impasse où se trouve encore la maison où il a vécu, en réponse à un article paru dans le quotidien français Le Monde, qui a relevé cet oubli de l'Etat et des autorités à l'égard de ces chouhada d'origine européenne qui ont consenti le sacrifice suprême. Rappelons qu'aujourd'hui encore, aucune rue d'Alger ne porte le nom du chahid Henri Maillot. Autre moment d'émotion fut sans doute celui au cours duquel le fils d'un ancien condamné mort a pris la parole pour annoncer qu' il était prêt à baptiser sa propriété agricole du nom du chahid Maillot.