Ils avaient su négocier âprement un régime d'autonomie dans le cadre d'une Constitution provisoire, mais ils savent à l'inverse qu'il n'y a aboslument rien de définitif, et qu'aucune partie ne prendra le risque de bousculer l'ordre même précaire des choses. C'est le sens de cette bataille pour une ville et son identité menée par les leaders kurdes. Comme Massoud Barzani chef du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), l'un des deux principaux mouvements kurdes irakiens, qui a réaffirmé, à Damas avec le chef de l'Etat syrien, la nécessité de préserver «l'unité nationale» de l'Irak. Une expression courante, mais qui ne revêt aucun caractère de banalité pour les deux responsables. Les généralités, ce n'est pas à priori ce qui manque, mais ce qu'il y a à retenir, c'est que M. Barzani n'est pas particulièrement porté sur les voyages ou les déclarations à la presse, lui qui sait se faire discret mais terriblement efficace, avec un sens aigu de l'opportunisme, une qualité en politique, comme quand il s'agit de nouer des alliances, ou occuper un espace. Là s'arrête la langue de bois. Selon la version officielle de leurs entretiens, mais il n'y a pas que cela, MM. Assad et Massoud Barzani ont évoqué «la situation sur la scène irakienne». M. Barzani avait demandé aux pays voisins de l'Irak «de ne pas s'ingérer» dans la question de Kirkouk, en réaffirmant le caractère kurde de cette ville du nord de l'Irak. «Kirkouk est une ville kurde irakienne. Le problème de cette ville est une affaire intérieure irakienne, les pays voisins n'ont pas à s'ingérer» dans cette question, avait martelé M. Barzani qui a même affirmé être «sûr» que Kirkouk sera rattachée administrativement au Kurdistan irakien après un référendum. «Nous sommes sûrs qu'après la normalisation de la situation à Kirkouk, l'organisation d'un référendum (montrera) que l'immense majorité des habitants (de cette ville) sont Kurdes. Nous sommes sûrs par conséquent que Kirkouk retournera au Kurdistan» irakien, a déclaré M. Barzani visiblement déterminé à assurer la présence de sa communauté sur le nouvel échiquier irakien, et son assurance pourait faire peur au regard des arguments y compris militaires que peuvent mettre en œuvre les formations kurdes. Sauf bien entendu aux voisins (Turquie, Iran et Syrie) qui craignent l'effet domino ou de contagion, puiqu'ils abritent eux aussi des communautés kurdes. Autant que la Tuqruie, la Syrie, voisine, est farouchement opposée à la création d'un Etat kurde indépendant dans le nord de l'Irak. La population kurde de Syrie, estimée à 1,5 million de personnes, représente environ 9% de la population du pays. Outre la reconnaissance de leur langue et de leur culture, les Kurdes syriens affirment revendiquer des droits politiques et administratifs «dans le cadre de l'intégrité territoriale du pays». Elle se prononce régulièrement en faveur de l'intégrité territoriale de ce pays. Le 2 octobre dernier, des centaines de Kurdes avaient manifesté à Kirkouk pour demander l'organisation d'un référendum sur l'avenir du Kurdistan et y rattacher la ville pétrolière. Le PDK et l'autre grand parti kurde, l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), ont ouvert des bureaux dans la ville après la chute de Saddam Hussein en avril 2003 et ne cachent pas leurs projets de la rattacher aux trois provinces autonomes du Kurdistan. L'UPK et le PDK, qui se partagent le contrôle des trois provinces kurdes de Souleimaniyah, Dohouk et Erbil, n'appellent toutefois pas à l'indépendance et sont favorables à une large autonomie du Kurdistan dans le cadre d'un Irak fédéral. Kirkouk est le théâtre d'affrontements endémiques entre Kurdes, Arabes et Turcomans depuis la chute du régime de Saddam Hussein en avril 2003. Selon M. Barzani, le conflit à Kirkouk entre les différentes ethnies, kurde, arabe et turcomane, «n'est pas du tout motivé par le pétrole, qui appartient à tous les Irakiens». Les revendications des Kurdes, a-t-il dit, ont pour but d'«annuler les traces de l'arabisation effectuée par le régime déchu (de Saddam Hussein) et l'injustice qui a frappé les Kurdes et les Turcomans aussi» dans cette ville. Les Kurdes revendiquent le contrôle de la ville soulignant qu'elle était majoritairement kurde dans les années 1950, avant que le régime de Saddam Hussein n'entame une arabisation forcée du nord de l'Irak. «Nous ferons face à tout projet visant à modifier la situation démographique à Kirkouk, (…) qui historiquement et géographiquement est une ville kurde faisant partie de l'Irak», a également déclaré M. Barzani en réponse à une question. Il a ajouté en outre qu'il n'y avait «aucune intention» de reporter les élections prévues en janvier en Irak. «Les élections auront lieu à la date fixée», en dépit des problèmes de sécurité, selon lui. Il reste que le leader kurde qui n'a jamais ouvertement revendiqué l'indépendance de cette région que le pouvoir irakien ne contrôle plus depuis 1991, a déjà mis en place en même temps que l'autre leader Jalal Talabani chef de l'UPK (Union patriotique du Kurdistan), des institutions qualifiées de souveraineté qui avaient fait réagir en 2002 déjà, les autorités turques, elles aussi fermement opposées à la création d'un Etat kurde indépendant, en accusant même les Etats-Unis de susciter un tel activisme, et révélé l'existence d'une armée kurde ou ce qui apparait comme tel au regard de son effectif et de son entrainement assuré par des instructeurs américains.