Au royaume wahhabite, le combat féministe est dur et les conquêtes sont minces. La nomination d'une femme, Mme Noura Al Fayez, au poste de vice-ministre de l'Education sonne comme une victoire pour les femmes saoudiennes auxquelles on interdit de travailler, de voyager ou d'accéder aux services médicaux sans l'autorisation d'un membre masculin de la famille. Depuis plus d'un an, le royaume a multiplié les initiatives en faveur de l'émancipation de la femme saoudienne. Des avancées qui peuvent paraître modestes, mais qui sont, en Arabie Saoudite, considérables. La frustration des citoyennes du royaume est d'autant plus grande que la jeunesse féminine est hautement qualifiée. Les jeunes femmes saoudiennes représentent près des trois quarts des diplômés de l'enseignement supérieur. Certaines choisissent de s'expatrier dans les pays voisins, comme le Bahreïn ou le Koweït, pour pouvoir exercer un métier. Dans le sillage des réformes entamées par le roi Abdallah en 2005, les femmes ont ouvert des portes qui leur étaient jusque-là fermées. Elles peuvent désormais intervenir dans certaines professions juridiques, dans les professions du tourisme avec une première promotion d'étudiantes spécialisées dans ce domaine en mai 2008 ou dans les entreprises de travaux publics. Parmi les mesures destinées à donner plus de liberté aux femmes, certaines prêteraient à sourire tant elles sont teintées de bigoterie. En 2008, quelque temps après la mise en place d'un hôtel à Riyad réservé aux femmes, le royaume a permis aux femmes chefs d'entreprises de voyager sans un accompagnateur masculin. Ces décisions qui peuvent paraître outrageantes pour les femmes aux yeux des Occidentaux sont saluées par les associations féministes qui exercent en Arabie Saoudite. Tout dépend de l'angle où l'on se place pour apprécier les efforts entrepris par les Al Saoud pour changer les choses. Alors que la décision parlementaire de faire figurer sur les documents d'identité non pas les photos des femmes mais leurs empreintes digitales peut être considérée comme une nouvelle dérive islamiste, elle est perçue comme une volonté de rendre plus difficiles les cas de fraude, notamment dans les affaires d'héritage, de protéger plus efficacement les droits des citoyennes du royaume. Il reste néanmoins de nombreux paradoxes dans le pays des Al Saoud. Une femme peut devenir ministre sans qu'on lui accorde le droit de manipuler une voiture, un fait dénoncé par les princesses du royaume, notamment la princesse Amira Al Taweel. Les femmes qui occupent de hautes fonctions dans les pays du Golfe peuvent se compter sur les doigts de la main. On peut citer une femme juge et une femme ministre du Commerce aux Emirats arabes unis, ainsi que celle qui a fait le plus parler d'elle dans la presse arabe, l'ambassadrice du Bahreïn aux Etats-Unis qui serait de confession juive. Malgré les réticences d'ordre religieux, disent les analystes arabes, les choses bougent en Arabie Saoudite. Il y a quelque temps, un débat sur l'ouverture de salles de cinéma y a fait rage. Là encore, le sujet pourrait paraître banal, mais dans le contexte saoudien, il a valeur de mini- révolution culturelle. Pour certains, il s'agirait d'une révolution en trompe-l'œil. Malgré le débat enclenché, les Saoudiens continueront à faire des kilomètres dans les pays environnants pour simplement voir un film. La société saoudienne est en marche mais reste à la traîne…