Handhala garde le silence, garde ses bras derrière le dos et ne se tournera pas. Saïd Hamoudi, auteur d'une nouvelle pièce portant le nom du personnage du caricaturiste palestinien Naji Al Ali, a laissé Handhala dans son rôle d'observateur. Le jeune dramaturge, invité dimanche de l'Echo de plumes à un débat animé par le journaliste et poète Abderrazak Boukeba, au Théâtre national algérien (TNA) à Alger, a imaginé les derniers jours de la vie de Naji Al Ali. Le caricaturiste a été assassiné à Londres en 1987. Il collaborait à l'époque avec Alqabas Aldawliya. L'assassinat fut attribué au Mossad. La pièce de Saïd Hamoudi, qui sera montée par le TNA, est divisée en quatre parties : l'épée dans la poitrine, couler dans le puits de la folie, la conscience de la révolution a provoqué le naufrage du bateau du retour et celui qui tait la voix casse le rameau d'olivier. Naji Al Ali et Raâd, son ami, sont les deux personnages de la pièce. Ils discutent des menaces de mort que le journaliste reçoit par téléphone. « Le corbeau me harcèle. Un cauchemar », se plaint le caricaturiste. « Arrête donc de t'entêter. Le pays ne t'appartient pas à toi seul », s'emporte Raâd qui tente de le persuader de cesser la provocation. « Si chacun de nous se taisait, la Palestine ne serait qu'un souvenir », réplique le père de Handhala. « L'impulsion et la folie constituent le chemin le plus court vers la mort », reprend Raâd qui, lui, parle des plaisirs de la vie et des nuits colorées. « La vie ? C'est de refuser que mon pays soit vendu aux enchères », lance l'artiste. « Tu rêves l'ami ! » « Toute révolution commence par un rêve », appuie Naji Al Ali. Plus loin, le caricaturiste parle de sa vie et de sa jeunesse passée dans le camp de réfugiés palestiniens de Aïn El Helweh au Liban. C'est là que Ghassan Kanafani l'avait découvert par hasard en publiant ses premières planches dans la revue El Houria, organe du Mouvement nationaliste arabe. Ghassan Kanafani, écrivain et journaliste, est l'auteur des célèbres nouvelles Retour à Haïfa et du roman Âlam laysa lanâ (Un monde qui n'est pas le nôtre). Il fut le porte-parole du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) de Georges Habbache, avant d'être tué dans un attentat à la voiture piégée à Beyrouth en 1972. Handhala, un garçon de dix ans aux pieds nus donnant son dos au monde entier et ne s'appuyant sur aucune terre, est apparu la première fois en 1969 dans les pages du quotidien koweitien Al Siyassa (la politique). Il est devenu, au fil des ans, le symbole du combat du peuple palestinien et de « l'amertume » de cette lutte. « Handhala ne recommencera à grandir que lors de son retour sur sa terre natale », a expliqué Saïd Hamoudi. Naji Al Ali avait reconnu que son « enfant » n'est ni bien portant ni heureux. « Il va nu-pieds comme tous les enfants des camps de réfugiés. Ses cheveux sont ceux du hérisson qui utilise ses épines comme arme. Au début, il était un enfant palestinien, mais sa conscience s'est développée pour devenir celle d'une nation puis de l'humanité dans sa totalité. Ce personnage que j'ai créé ne disparaîtra pas après moi », avait-il déclaré. Saïd Hamoudi n'a pas voulu faire « jouer » Handhala dans sa pièce. « C'est difficile de le faire. Peut-être dans la mise en scène, on va essayer quelque chose. Mais Handhala est silencieux. S'il parle, que va-t-il dire ? », s'est-il interrogé. Selon lui, Naji Al Ali ne justifiait pas son combat dans la pièce. « C'est une impression qu'on peut avoir. Mais, le caricaturiste est face à un intellectuel lâche, le modèle de ceux qui veulent vivre en oubliant l'essentiel », a expliqué Samir Hamoudi qui va publier la pièce sous forme de livre aux éditions Dar El Hikma. Citant un personnage de sa pièce, il a ajouté : « on se dit que le destin des enfants palestiniens n'est pas de jeter des pierres. Ils doivent pouvoir jouer avec des boules de neige aussi. » Abderrazak Boukeba a souhaité que la pièce Handhala soit jouée sur les planches d' « El Qods, capitale de la culture arabe 2009 ». Attaché au principe de soutenir l'expression des jeunes artistes, l'animateur de l'Echo de plumes a invité le poète Nacereddine Hadid, fraîchement sorti de l'université et les break dancers de Dziri One à prendre la parole. Omar et Mustapha de Dziri One ont exécuté une petite performance qui a ajouté une ambiance à l'Echo de Plumes. Dziri One prépare un spectacle pour la mi-avril à Annaba. Pour l'instant, les membres du groupe s'éclatent à leur manière sur Youtube et sur Facebook.