La dynamique de développement que connaît la région, notamment avec le projet de dédoublement de la RN 1, l'urbanisation des zones amont des bassins versants et la disparition du couvert végétal ont accentué le processus d'ablation des terres agricoles dû à l'intensification de l'activité du ruissellement. Sur une dizaine de kilomètres à partir de l'amont de la localité de Ghzaghza, les travaux de bifurcation de la RN 1 ont laissé d'importantes bandes de talus formés de matériels très meubles et dénudés qui s'effondrent par pans entiers à chaque événement pluviométrique. Déjà, les canalisations de drainage destinées à la protection du pavé goudronné sont souvent comblées de boue, constate-t-on de visu, ce qui va augmenter les frais d'entretien des axes routiers de la région. Les bordures de la route inquiètent à juste titre les riverains qui voient leurs champs cultivés ou leurs prés peu à peu grignotés par la mécanique du ruissellement. Egalement les glissements par paquets de terrain touchent de plus en plus fréquemment la région. Les inquiétudes des agriculteurs sont d'autant plus justifiées quand on sait que le grignotage des parcelles cultivées et des prés s'intensifie. La région de Ouzera est traversée par les isoètes des 600 à 1000 mm/an et connue notamment aussi par ses pluies fines qui saturent les sols vulnérables constitués essentiellement par des marnes passant à des argiles en certains endroits, provoquant ainsi des coulées boueuses. « L'Oued Bouhnache, l'un des plus importants affluents qui rejoint plus en aval Oued Chiffa, d'habitude par effet de dilution, ses eaux deviennent très claires à la mi-hiver, vous constatez cette année que malgré une pluviométrie très active, l'eau est restée très trouble », affirme un citoyen de Ouzera. La reconversion des cultures par l'alternative des pratiques culturales intensives et inappropriées (cultures céréalières, aliment de bétail…) à la vocation du paysage montagneux de la région, et le dépérissement des vignobles vieillis, non remplacés, constituent d'autres facteurs qui ont accéléré l'appauvrissement de la couverture pédologique des sols. Un nostalgique du bon vieux temps qui pratiquait la chasse du gibier a déploré le fait que plus de 3 km d'une forêt de chêne qui surplombait les localités de Ouzera, de Ben Haddou, de Boussena et des Ben Aïch, s'est transformée en une sorte de désert où les paysages de garrigues et de broussailles dominent le flanc des falaises. Dans une récente communication publiée à l'occasion d'un colloque international sur la gestion des ressources en eau (à Tipaza les 27 et 28 janvier 2009), Kouidri Rabia, chargée de recherche à l'Institut national des recherches forestières de Médéa, a tiré la sonnette d'alarme : « Depuis 2005 avec la reprise de la pluviométrie, on se trouve dans une phase aiguë de creusement et du processus de ravinement. Le creusement l'emporte sur le comblement ». Dans ce sens, elle a cité l'exemple de la route reliant Ouzera à Kef Boukhelil qui, à chaque année, connaît d'importants mouvements d'affaissement nécessitant des travaux de recharge par les services des travaux publics. Sur le chemin reliant El Djouahria à Ouzera, plusieurs ravins se sont formés suite à la réalisation de neuf seuils en gabion et un mur de soutènement par les services forestiers. Cette correction torrentielle a été conçue sans prendre en compte les données d'un rapport détaillé remis aux autorités locales, sur la réhabilitation de ces zones », ajoute-t-elle. Le processus d'appauvrissement des sols, tient-elle à préciser, est irréversible et il faut agir au plus vite. Evoquant les autres facteurs stimulant la déperdition par ruissellement de la fertilité des terrains agricoles, une chercheuse de l'INRA a mis à l'index les agriculteurs qui labourent dans le sens des grandes pentes sur les terrains en déclivité. Ceci facilite ainsi la formation des talwegs (des ravines) qui provoquent le départ des couches superficielles très riches en humus fertiles. Plus en aval du côté d'EL Hamdania, à une vingtaine de kilomètres du centre-ville de Médéa, il y a autant de craintes pour les stations de traitement des eaux. L'augmentation de l'activité de charriage par les oueds des matières en suspension (MES) ou des particules grossiers engendre souvent des surcoûts de potabilisation des eaux et influe négativement sur la capacité de fonctionnement du matériel de ces stations qui est mise en péril par ces eaux très chargées. Pour l'instant, le constat est clair : beaucoup d'agriculteurs ont délaissé leurs terres en raison des mauvais rendements enregistrés ces dernières années, alors que le ravinement continue de prendre d'énormes quantités de matières organiques perdues à jamais, mais aussi des routes défoncées, des ouvrages de drainage obstrués, des conduites d'AEP déterrées