Cette rencontre a pour objectif de jeter les bases d'une «initiative commune» pour riposter aux «attaques» dont font l'objet les syndicats autonomes. «Depuis notre création, nous nous sommes contentés de faire un travail pédagogique basé sur la proximité et la sensibilisation. Maintenant, nous avons décidé d'aller vers une démarche unifiée. Nous allons étudier la situation et soumettre un plan d'action aux syndicats. Cette démarche n'exclut aucun syndicat autonome», a indiqué Tahar Besbes, coordinateur du CNLS, lors d'une conférence de presse animée, hier, au siège du Syndicat national des officiers de la marine marchande (SNOMMAR). Une pétition pour la protection des libertés syndicales sera également initiée aux niveaux national et international. A l'occasion de cette rencontre, M. Besbes a donné les grands axes du premier rapport préliminaire des libertés syndicales élaboré par le CNLS. Un comité qui, rappelle-t-on, regroupe plusieurs syndicats autonomes (SNAPAP, CNAPEST, CLA, SATEF, SNPSP et SNTE). Le document en question sera remis aux hautes autorités. Pourquoi un rapport ? M. Besbes estime qu'il est urgent de pallier l'inexistence d'un observatoire des libertés syndicales en Algérie. «Le CNLS, en vertu des dispositions de sa charte, s'est vu dans l'obligation d'être cet observatoire qui aura à recenser, analyser et élaborer des rapports annuels en toute objectivité et sans complaisance.» De son côté, M. Osmane du CLA relève qu'il est important que des constats sur les libertés syndicales et sur ce que subissent les travailleurs émanent des organisations algériennes. Il fallait, de l'avis de M. Besbes, établir un contre-discours pour mettre à nu les desseins des pouvoirs publics et faire connaître la réalité du terrain. En somme, le rapport, selon l'orateur, est une contribution pour l'élaboration des lois sociales. Le rapport préliminaire du CNLS de 16 pages met, en premier lieu, en exergue les atteintes aux libertés syndicales les plus récurrentes en Algérie. Il recommande aussi au Pouvoir de cesser toutes les actions qui tendent à restreindre l'exercice du droit syndical. Les atteintes recensées sont au nombre de cinq (atteintes au droit de constituer des syndicats, de fédérations et confédérations, au droit de choisir la ligne syndicale, au droit de participer aux négociations collectives, à l'exercice du droit syndical et persécution des syndicalistes, au droit de grève). Le CNLS a dénoncé également le parti pris de l'administration dans les affaires internes des organisations syndicales. Parmi ces exactions, le document énumère le refus d'enregistrer la Confédération des syndicats autonomes (CSA) en 1995 et le Syndicat national des travailleurs algériens (SNATA), la décision d'investir le secteur économique a été prise par le SNAPAP lors de son congrès et le dossier relatif à la constitution du SNATA a essuyé un refus catégorique des autorités. Le ministère du Travail s'appuie sur la loi 90/14 du 2 juin 1990, notamment son article 2 qui ne permet pas l'enregistrement de syndicats non sectoriels. «Ce refus est une violation flagrante de l'article 2 de la convention n°87 de l'OIT», affirment les rédacteurs du rapport. Refus également d'enregistrer le CLA, le CNAPEST, le SNPSP et la CASA. De son côté, le Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) a lui aussi été victime d'entrave au droit syndical. La grève déclenchée en décembre 2001 a été qualifiée de «crime» par le ministre de la Santé de l'époque et le mouvement de débrayage déclenché en juin 2004 a été qualifié de «terrorisme social» par le même département. De nombreux syndicalistes du SNPSP ont fait l'objet d'intimidations et même de sanctions abusives. Le SNOMMAR, rapporte le document, n'a pas échappé à ce procédé. Il a été victime d'une véritable machination administrative. Juste après le déclenchement de la grève initiée par les adhérents du syndicat, l'administration de l'ENMTV a procédé au recrutement de briseurs de grève. Ces derniers, des travailleurs d'une autre compagnie de transport, sont recrutés pour des durées n'excédant pas trois mois. L'administration de l'ENMTV a déclaré la grève illégale. M. Besbes, dans son intervention, a qualifié de procédé grave le fait de poursuivre en justice le CLA ou le CNAPEST avant même qu'ils n'enclenchent leur mouvement de grève. Il a, en outre, dénoncé la démarche du pouvoir consistant à écarter des négociations les syndicats autonomes qui sont des partenaires sociaux, à l'image de l'UGTA. Profitant de la circonstance, le CNLS a adressé un appel aux autorités algériennes les invitant à respecter les droits des travailleurs de constituer des organisations syndicales de leur choix et de s'affilier à ces structures. Les syndicalistes attendent également de l'Etat qu'il permette aux organisations des travailleurs de constituer des fédérations et des confédérations, qu'il respecte le droit des travailleurs à participer aux négociations collectives à travers leurs organisations syndicales respectives et qu'il considère les syndicats autonomes comme de véritables partenaires sociaux. Les membres du CNLS souhaitent aussi la traduction sur le terrain du principe de la neutralité de l'administration, l'arrêt de toute ingérence dans les affaires internes des organisations syndicales et le respect du droit de grève.