Une famille de cinq personnes, victime de la tragédie nationale, vivote depuis plus de cinq dans un garage (situé au niveau de la cité Hachemi, deuxième tranche) dépourvu d'éclairage et d'aération. L'espace où s'entassent ces personnes, dont des enfants en bas âge, met la santé de ces « oubliés » en danger. Les toilettes sont juste derrière le lit près du réchaud trépied, et le linge est étendu à l'intérieur du garage, lequel ne dispose que d'une ouverture minuscule. En pénétrant à l'intérieur, le visiteur est happé par une odeur de moisi étouffante. Cette famille, qui vit dans des conditions inhumaines, a besoin de l'attention des responsables qui ne se manifestent toujours pas. Il faut se déplacer sur les lieux pour mesurer l'étendue du drame d'une famille, dont le père, B.A., chauffeur au niveau de l'APC de Babor, a été assassiné le 26 avril 1994 après avoir été enlevé par des terroristes du siège de la mairie où il assurait la permanence. L'aînée des enfants, B.H., une jeune fille de 23 ans, souffre du Takayashu, une maladie inflammatoire des vaisseaux atteignant essentiellement les artères de gros calibre (aorte et artères pulmonaires). Selon des médecins que nous avons interrogés, les causes de cette maladie ne sont pas connues, cependant, la coexistence d'une tuberculose due aux conditions de vie et à l'humidité du garage où vit le malade depuis presque neuf ans font penser à une origine infectieuse qui aurait déclenché une réaction défensive anormale de l'organisme. Et comme un malheur n'arrive jamais seul, la jeune fille a dû quitter l'institut de formation (INSFP) de la cité des 500 logements où elle suivait une formation d'archiviste documentaliste à cause des hospitalisations récurrentes depuis plus de deux ans au CHU de Sétif et à Aïn Naâdja, Alger. Son frère, B.F., tombé dans le coma après avoir été électrocuté, est chômeur. Le fort taux d'humidité est à l'origine de cette électrocution qui aurait pu lui coûter la vie. Quant à B.S., l'avant-dernier des quatre enfants, il a été dans l'obligation de mettre un terme à ses études pour travailler et aider sa mère. Le benjamin, B.A., âgé de 15 ans, scolarisé en 3ème année moyenne, qui n'est pas épargné par la maladie non plus, souffre d'un début d'asthme. Ne sachant à quel saint se vouer, cette famille, meurtrie dans sa chair, attend non seulement un geste des responsables mais une attention particulière des institutions de l'Etat, d'autant plus que le père est mort pour l'honneur de la République.