– La mise en place d'un marché de changes à terme La mise en place de ce marché permettra d'éviter l'erreur commise en 1994 où les risques de couverture étaient assumés par la seule Banque d'Algérie, l'Etat devenant indirectement le garant des pertes de changes des entreprises. Les intervenants de ce nouveau marché, banques et établissements financiers, pourront coter les devises dans les deux sens, acheteur et vendeur, grâce à la mise en place du précédent marché monétaire. Le marché monétaire des devises permet en effet à ses intervenants de pouvoir dénouer les montants non soldés de leurs positions de change à terme, à travers une opération d'emprunt et une opération de change au comptant. Comment ? Si une banque vend une devise à terme contre dinar, par exemple, elle peut neutraliser son risque en empruntant la devise vendue à terme et en la revendant au comptant, puis en plaçant les dinars ainsi obtenus sur la même durée. A l'échéance, l'emprunt en devises sera remboursé par les devises achetées sur le marché au comptant grâce aux dinars placés à terme. La différence entre les cours à terme et les cours au comptant ne traduit que la différence entre les taux d'intérêt du dinar et de la devise considérée. – 10. Ajustement par le taux de change ou par le «Fonds de régulation des recettes» : il faut choisir Faut-il saluer la décision d'établir les lois de finances sur la base d'un baril à 19 dollars ? Nous ne connaissons rien des raisons qui ont inspiré cette décision, mais pensons que ce fonds a été créé pour servir de cagnotte en cas de baisse drastique des recettes fiscales par suite d'un retournement du marché pétrolier. Dans ce cas, il nous semble renvoyer à la problématique de change, d'une certaine manière. Certains ont par ailleurs comparé ce fonds à celui que la Norvège a mis en place qui capitalise à l'intention des générations futures une partie de ses ressources pétrolières. Celles-ci sont logées à cet effet dans un fonds spécial. Mais ce fonds, qui n'est pas libellé en monnaie norvégienne, est géré de manière indépendante du gouvernement et se trouve placé sous le contrôle du Parlement. Par comparaison, le fonds algérien qui abriterait actuellement 1 500 milliards de dinars soit l'équivalent de 20 milliards de dollars appelle les remarques suivantes : – Il n'est pas contrôlé par l'Assemblée nationale et sa gestion n'est pas transparente. – Le fait qu'il ait servi à rembourser une partie de la dette extérieure (notre ministre des Finances a donné le chiffre de 13 milliards de dollars, soit 900 milliards de dinars) ne saurait à lui seul justifier son existence. Ces remboursements pouvant se faire dans le cadre de la gestion des excédents du Trésor qui auraient résulté d'une comptabilisation des recettes fiscales pétrolières au prix du marché. – Si ce fonds vise enfin la préservation des équilibres macro-économiques et les réserves de change à travers le maintien de la demande de devises dans certaines limites, (objectif louable en soi), il faut rappeler qu'il est monétisé, c'est-à-dire que ses liquidités sont dans le circuit dinar. Or, ces liquidités exercent forcément de par leur masse, via le marché monétaire, des effets sur la consommation et les importations, donc sur les équilibres en question. Leur effet sur ces catégories n'est donc pas neutre, comme l'est le fonds norvégien ! Une régulation par le marché des liquidités induites par les excédents budgétaires assure bien mieux la sauvegarde des équilibres macro-économiques et des réserves de change, dont le rôle reste, quoi qu'il arrive, celui de servir de couverture à la monnaie. En guise de conclusion à notre modeste contribution, nous espérons avoir aidé à ce que le thème de la convertibilité sorte de la sphère de sa gestion par la seule administration. On la trouvera trop courte ou trop longue selon la curiosité que l'on peut manifester à l'égard des questions monétaires. Puisse-t-elle éclairer tous ceux qui s'intéressent à ces questions et donner à nos étudiants en particulier l'envie d'aller plus loin dans l'exploration d'un domaine qui mérite mieux que le sort qui lui a été réservé jusqu'ici. La monnaie a en effet libéré l'homme des servitudes du troc. Elle l'a ensuite accompagné et soutenu dans toutes les étapes de son émancipation. Chaque fois qu'elle a été entravée, sa liberté et sa prospérité ont reculé. Les guerres et les régimes totalitaires, producteurs d'inflation, n'ont-ils pas laissé leur empreinte, comme autant de stigmates dans chaque monnaie ? Il n'y a qu'à voir pour s'en convaincre, les cours à plusieurs chiffres de certaines monnaies comme le yen japonais ou certaines monnaies européennes avant l'introduction de l'euro pour s'en convaincre. Notre dinar ne porte-t-il pas, lui-même, quelque chose qui y ressemble ?