Si les uns choisissent de voyager seuls, les autres préfèrent les séjours organisés. Les deux ont toutefois une envie en commun : faire une coupure avec le quotidien et prendre un peu de recul. Les agences de voyages proposent dans ce contexte une évasion sans frontières : l'Egypte avec ses pyramides, son Nil, sa culture et sa musique, la Grèce avec ses somptueux vestiges helléniques, la Turquie et son Bosphore et… la grande muraille de Chine. Les destinations qu'ils préfèrent ces dernières années sont par priorité la Tunisie et accessoirement l'Egypte, la Turquie, le Maroc et les pays du Moyen-Orient ainsi que l'Europe. Cependant, cette dernière destination est de plus en plus difficilement accessible surtout depuis la création de l'espace Schengen. Les demandes sont traitées individuellement et les opérateurs ont très peu la possibilité d'obtenir des visas. D'après les statistiques du ministère du Tourisme, 1 513 491 Algériens ont traversé les frontières. Les pays les plus visités sont en première position la Tunisie (708 575 touristes), la France (396 692), l'Arabie Saoudite (110 848), l'Espagne (80 499) et la Turquie (40 714). D'autres pays touristiques ont la cote : la Libye (34 988 touristes), le Maroc (29 015), la Syrie (22 453) et la Grande-Bretagne (17 501).Si on analyse les statistiques officielles, les Algériens se déplacent le plus vers la Tunisie. Hammouche Belkacemi, président-directeur général de l'Onat, explique : «10 % environ partent en Tunisie pour des besoins de tourisme, le reste, il s'agit particulièrement de frontaliers qui sortent aisément. Ils sont comptés par nos amis tunisiens comme des touristes. Il y a aussi l'Europe comme deuxième destination des Algériens, les professionnels du tourisme pratiquent très peu cette destination. Ils aident au traitement de la clientèle mais l'écueil des visas ou l'obligation qui est faite aux voyagistes d'envoyer leurs clients traiter personnellement le visas fait que nous ne faisons très peu ou pas du tout de package sur la France. Il y a par contre un pays où quasiment tous les Algériens sont traités par les opérateurs du tourisme, c'est l'Arabie Saoudite : sur les 110 000 touristes, 38 000 personnes constituent des pèlerins qui partent dans le cadre du hadj, le reste sont des pèlerins de la omra.» En ce qui concerne l'Onat, cette agence a pris en charge sur les destinations à l'étranger 3000 touristes dont 70% sur la Tunisie et le reste est constitué de pays comme l'Egypte, la Turquie, le Maroc et la Syrie. 4000 personnes ont choisi ce tour operator (TO) pour effectuer le hadj et 4000 autres pour la omra. L'Onat a organisé des vacances dans l'extrême Sud pour 1281 personnes et reçu 2818 touristes étrangers. Le champ d'intervention de l'Onat se situe au niveau de la conception, l'élaboration et la vente de produits touristiques, qu'ils soient destinés à une clientèle nationale ou étrangère. De plus en plus d'Algériens ont recours à des agences de voyages pour planifier leurs vacances et les aider à sélectionner les meilleurs endroits où ils pourront bénéficier d'un peu de rêve et de beaucoup d'évasions. Le facteur prix aura une incidence forte sur les voyages effectués par les Algériens en matière de vacances. Ce phénomène se concrétise par la très forte croissance des voyages à destination des pays dans lesquels les prix sont mesurés. Les destinations les plus proches ont généralement bénéficié d'un surcroît d'arrivées, aux dépens des destinations plus lointaines. Il a été relevé un plus grand intérêt pour les vacances offrant une expérience nouvelle plutôt qu'une destination spécifique et une augmentation de la demande pour des expériences «authentiques», incluant les cultures locales et l'approche de la nature. On observe également un goût plus prononcé pour l'itinérance : la mobilité s'accroît en fonction de la météo, des besoins familiaux, des envies du moment, des fêtes ou événements divers. Beaucoup se sont aperçus à leurs dépens qu'il est préférable de payer un séjour en Algérie que d'aller par exemple en Tunisie en plein été où il est quasiment impossible de trouver des établissements de qualité, et s'ils les trouvaient, c'est à des prix excessifs. L'agence de voyages offre des garanties et un séjour dont on connaît les prix (séjour + transport aérien). Ils y gagnent en principe à tous les coups : sécurité, sûreté et prix négociés. La destination Maroc arrive progressivement mais le produit est plus cher que la Tunisie car il est plus élaboré. C'est un tourisme de circuits et de découvertes qui utilisent plus de prestataires alors que les Tunisiens ont bâti leur stratégie de développement sur des offres à très bon marché. Contrairement à la Tunisie et en dépit de l'annulation de la procédure du visa pour les Algériens, les frontières terrestres avec le Maroc sont hermétiquement fermées. Les voyageurs ne peuvent s'y rendre que par la voie aérienne (Air Algérie et la RAM). Ce qui pèse sur le budget et justifie, en partie, la cherté de cette destination. En plus, l'Office du tourisme marocain ne fait pas beaucoup de publicité pour inciter les Algériens à visiter le royaume, contrairement aux autorités tunisiennes qui ont fait un inlassable travail de proximité ces dernières années. Marrakech est ainsi devenue la plus appréciée par les Algériens. Sabiha, femme active, la trentaine, a eu la chance d'y aller. Plus qu'un voyage pour changer de cadre de vie, elle est partie à la rencontre de paysages magnifiques. Elle est revenue avec pleins de souvenirs et surtout beaucoup d'impressions : «C'est une ville orientée vers la culture, le divertissement et le plaisir. Un lieu animé et célèbre pour ses souks et ses festivals. La place Djamaâ El Fna est son cœur palpitant. Le minaret de la Koutoubia est splendide. Il y règne une effervescence palpable, une atmosphère…» Abderrafik, père de famille, préfère Casablanca. Une ville qui «lui rappelle étrangement Oran». Ses pas de voyageur l'ont amené jusqu'à la grande mosquée Hassan II, «une mosquée entre ciel et mer», dira-t-il. Les Algériens jettent aussi leur dévolu sur Istanbul, où ils peuvent à leur gré visiter, flâner ou faire leurs emplettes dans les nombreux bazars de la vieille ville. «Les offres locales sont quasiment identiques en fonction des produits, si on opte pour un séjour de découverte, cela va de soi que les tarifs sont beaucoup plus chers qu'un séjour balnéaire à Charm El Cheikh. Plus les prestataires sont nombreux plus les prix sont élevés», affirme le PDG de l'Onat. Y a-t-il des destinations un peu exotiques et lointaines qui intéressent les Algériens ? «Effectivement, il y a de la demande, et bien souvent comme nous n'avons pas un nombre nous permettant d'obtenir des tarifs importants, nous sous-traitons avec nos partenaires européens des destinations styles Cuba, Chine et tous ces pays émergents sur le plan touristique tels que la Thaïlande. C'est envisageable tant qu'il y a de la demande», répond tout de go le patron de l'Onat. Malte, voilà une autre destination que les agenciers tentent de vendre aux Algériens depuis plusieurs années. Un séjour d'une semaine dans cette île située à mi-chemin entre la Tunisie et la Sicile est proposé à partir de 60 000 DA. C'est une destination inconnue de nos compatriotes, mais beaucoup sont partants pour ce voyage de curiosité. Les touristes qui partent à la découverte de la Malaisie se recrutent dans les milieux d'affaires, chefs d'entreprise, professions libérales, voire diplomatiques. On ne peut encore parler de nouvelle destination touristique des Algériens vu le coût exorbitant du voyage (autour de 200 000 DA). Qatar Airways propose cette destination via son hub (plateforme de correspondance) de Doha. La Tunisie vient en pole position. Les statistiques de l'Office national du tourisme tunisien (ONTT) parlent de 930 000 Algériens qui ont visité ce pays en 2005, dont 85% par route et 15% par avion. Le marché du transport aérien est partagé entre la compagnie nationale Air Algérie et Tunisair (6 vols/semaine entre mars et octobre). La compagnie tunisienne a ouvert, depuis le 28 mars dernier, une nouvelle ligne aérienne Tunis-Oran, à raison de deux vols hebdomadaires assurés mardi et vendredi. Cette nouvelle liaison aérienne a pour objectif de promouvoir les échanges économiques, commerciaux et touristiques entre l'Ouest algérien et la Tunisie. Autre bonne nouvelle annoncée par la compagnie, l'aménagement d'un espace privilège sur ses avions desservant la ligne Tunis-Alger. Une petite cerise sur le gâteau qui ouvrira l'appétit des gourmands du voyage. Zied Ben Hassen, représentant à Alger de l'office, nous a affirmé : «Les régions les plus visitées sont Nabeul, Hammamet et Sousse. Les voyageurs viennent en familles ou individuellement. 40% des entrées sont enregistrées entre le 15 juillet et le 15 septembre. La durée moyenne des séjours est estimée entre 8 et 10 jours. 10% passent par des agences de voyages qui commencent à se professionnaliser.» Les motivations de ce déplacement dans le pays du village bleu de Sidi Boussaïd et Djamaâ Ezzitouna sont multiples. Il y a d'abord la proximité géographique et le rapport qualité/prix, sans oublier l'histoire commune et l'absence de visa d'entrée. Après l'attentat de Djerba en 2002, qui a mis en difficulté le tourisme tunisien, les Algériens ont été courtisés. Depuis, l'ONTT a continué les opérations de charme. Des journalistes algériens sont même invités régulièrement pour découvrir la Tunisie et surtout en parler. Dans ce contexte, l'ONTT veut promouvoir des régions telles que Mahdia, Djerba ou Monastir. En termes d'entrée, les Algériens occupent la troisième place, après les Libyens et les Français, mais en termes de nuitées, ils sont classés 13e. Pour mieux attirer les touristes algériens, les opérateurs sont de plus en plus nombreux à leur faire un clin d'œil lors du Salon international du tourisme et des voyages (Sitev). La Tunisie y participe cette année avec un stand de 120 m2 avec une troupe folklorique pour créer un univers propice à l'envie du voyage. Avec le retour des nombreuses compagnies aériennes, il est fort à parier que le nombre des touristes algériens va encore augmenter.