Ce 21 janvier 2005, l'historien Hassen Derdour sera honoré à titre posthume. Cette date coïncide avec celle de la naissance de cet homme de culture et un des piliers de la musique, défenseur acharné de tout ce qui a trait à la culture en général à Annaba. La commune du chef-lieu de wilaya a tenu à ce qu'elle ne commémore plus le décès de l'auteur d'Hippone à travers tous les âges mais de faire comme s'il est toujours là en érudit d'une discrétion absolue. Hassen Derdour s'était éteint, le matin d'un 18 février dans sa maison de La Colonne, un des plus vieux quartiers de Annaba. De son vivant, il avait su communiquer sa passion d'une époque de la vie de Annaba l'austère. Il l'avait fait au travers de ses différentes œuvres dont Annaba 2000 ans d'histoire son livre culte et Le Malouf, ses composantes et compagnons de route auquel son nom est à jamais identifié. Quand on l'interrogeait, il prenait toujours soin de s'en tenir à tout ce qui fait l'histoire de Annaba. Il égrenait comme s'il s'agissait d'une prière des noms qui avaient fait la gloire de Annaba du théologien et homme de lettre El Walid El-Isbahani à Ahmed Ibn Ali Abbas El Bouni astrologue et théologien et de Ahmed Ibn Youcef Et-Tifachi géologue et musicologue aux martyrs de la révolution que furent, entre autres, Bouzered Hocine, Refes Zahouane, Rezgui Rachid, Rizzi Amor, Belaïd Belgacem, Babou Cherif... Comme ceux qui ont beaucoup appris et beaucoup donné à apprendre, Hassen Derdour, était très modeste. De cette modestie que l'on acquiert après avoir connu les honneurs au sein de la grande famille de la culture nationale. Cet homme qui n'avait pas cessé de naviguer dans le monde de la culture d'ici et d'ailleurs, cet homme qui respirait culture et vivait culture, cet homme-là aimait faire de longues marches, pour parcourir la terre généreuse de l'Edough. Il aimait chercher son inspiration en s'installant sur les hauteurs de Seraïdi. Il s'y arrêtait souvent pour annoter des faits, un signe, un vestige, une phrase ou note de musique surgissant au fil de ses pas. Hassen Derdour avait accumulé les honneurs. Ce qui ne réduisait en rien la sérénité de cet érudit modeste et généreux, de cet homme au regard profond, au sourire toujours empreint d'une réserve pleine de silence et de raffinement. Cet artiste, ce comédien, ce musicien, historien et astrologue fuyait comme la peste l'ostentation, le « je » et le mot de trop. Bien après son départ vers l'au-delà, Il suffit de lire ses œuvres pour relever son refus de la puérilité, apprécier sa maîtrise et la pureté de ses écrits d'un style tout en retenue. Hassen Derdour n'était pas rêveur. Pourtant, il concevait l'histoire de Annaba sous l'angle du beau et des légendes. Prosateur, il savait aussi rendre sensible les charmes lointains d'Hippone, ses places, ses châteaux, ses grottes merveilleuses, ses mystères et ses secrets. Pour avoir été un historien des annales où la biographie n'était pas le genre prisé, Hassen Derdour n'en a pas moins été l'auteur de plusieurs ouvrages que ses héritiers ont récemment édités. Il avait sa manière à lui de réconcilier les tenants de « l'ancienne » histoire et ceux qui ne jurent que par les lendemains de l'indépendance de l'Algérie. Jusqu'au bout de sa vie, Hassen Derdour aura cherché constamment à aider à comprendre Hippone, Bouna, Bône et Annaba, à chasser les ténèbres de la période coloniale, à en éclairer l'espace social et les phénomènes de mentalité, mais aussi à sonder les cœurs des civilisations qui s'y étaient succédé. Hassen Derdour aura appris aux Algériens et à tous les hommes de culture d'hier, d'aujourd'hui et de demain, qu'Hippone a son histoire arrachée aux retables des murs de La Casbah, des vestiges d'Hippone, des mosquées El Bey et Abou Marouane, de la vielle ville et des 7 dormeurs et autres. Histoire qu'il a su déchiffrer et raconter au fil des enluminures vieillies qui ont tout de même conservé des mémoires.