Entre une enfance sétifienne passée dans les jambes des fidayine et une jeunesse aussi dure de cadre communiste forcé à la clandestinité, la trame se construit en voyages allers-retours entre ces deux espaces-temps pour se fondre en un continuum car «le combat pour la libération de l'homme est le prolongement naturel du combat pour la libération du pays», souligne l'auteur. Le lecteur est transporté tantôt dans un haras du pays du Sraoui des dernières années de la révolution, tantôt dans les venelles étroites de La Casbah des années 1970 et la place des Trois Horloges. C'est là où le personnage central fuyant la police politique du parti unique va être confronté à un dilemme : se soumettre à la discipline rigoureuse de l'organisation ou bien répondre à l'appel du cœur et du sang et rentrer dans sa ville natale pour rendre visite à son frère gravement malade. Une situation pleine d'humanisme que tente de dévoiler ce roman «semi-biographique», pour échapper au piège du roman inféodé au discours politique. Un exercice difficile pour un intellectuel qui s'essaye à cette forme autonome de la littérature après avoir milité toute sa vie dans des milieux politiques. «C'est la dimension humaine que j'ai voulu montrer», affirme Omar Mokhtar Chaâlal, qui a signé son livre à l'occasion d'une vente-dédicace organisée à la librairie Média Plus à Constantine. Les personnages du Fugitif ne sont pas des super héros, en effet, et sont racontés d'une façon modérée avec des mots simples. Et pourquoi avoir choisi le roman pour témoigner de cette tranche de vie ? «C'est parce que je considère que le roman aujourd'hui est un mode d'expression approprié pour contribuer à l'écriture de l'histoire et permet, de par sa facilité, à la génération d'aujourd'hui de s'informer et de comprendre la place et l'apport des communistes et de la gauche en général dans l'histoire récente de l'Algérie, sans pour autant faire de la vulgarisation.» Sans prétendre à une littérature supérieure, Le Fugitif, qui peut être le premier roman à s'inspirer de l'épopée du PAGS, trouve sa place dans le paysage littéraire algérien comme un acte sincère de mémoire. Une page d'histoire revisitée à travers le cœur d'un acteur véridique pour qui «écrire est un acte militant». – Le Fugitif, roman, Casbah Editions, 2006.