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Une escalade aux conséquences incalculables
Publié dans El Watan le 15 - 07 - 2006

La réaction israélienne, jugée disproportionnée par nombre de pays européens, n'a trouvé grâce qu'aux yeux du président américain George Bush qui l'a justifiée tout comme il l'avait fait lorsque Israël avait soumis les populations palestiniennes à un déluge de feu après l'enlèvement par l'aile armée du Hamas d'un soldat israélien. Même cause, mêmes effets ? Les observateurs ne manquent pas de souligner qu'il y a une corrélation entre deux évènements intervenus en moins de trois semaines et dont le dénominateur commun est la volonté d'Israël de décider unilatéralement du sort de la région et de celui du peuple palestinien. L'armée israélienne a détruit les rares infrastructures collectives dont disposaient les Palestiniens privés d'eau, d'électricité et davantage encore de couverture sanitaire. Une politique de la terre brûlée qui entend sanctionner la branche armée du Hamas, mais aussi le Hamas lui-même, arrivé au pouvoir après sa victoire dans des élections que l'ensemble des observateurs avaient jugées régulières.
Cela n'a pas empêché les acteurs de décision américains et européens de couper toute aide à un gouvernement dirigé par le Hamas qui figure dans les organisations réputées terroristes. Ce qui a engendré, pour l'Autorité palestinienne, une situation de cessation de paiement dont pâtissent des milliers de fonctionnaires et leurs familles. Une position intenable car les Palestiniens dépendent totalement d'Israël pour leurs approvisionnements et ne bénéficient d'aucune marge de manœuvre. Le monde arabe a peu infléchi cette situation dramatique car ni les pays de la région ni les autres pays arabes n'ont la capacité de se manifester sur le terrain. En dépit du retrait unilatéral de Ghaza, Israël contrôle de fait les territoires palestiniens.
Le monde arabe n'est plus dans le contexte des années soixante ou soixante dix qui avaient vu éclater des conflits guerriers avec Israël. La Ligue arabe ni l'Organisation des Etats islamiques n'ont plus, dans les années 2000, le pouvoir de mobilisation qu'ils avaient il y a vingt ou trente ans. L'effondrement du bloc soviétique, l'émergence d'un nouvel ordre mondial conçu et imposé par l'Amérique, et surtout le fait que les pays arabes ne parlent plus d'une même voix, ont reconfiguré les enjeux au Proche-Orient. Une évolution qui s'est traduite par le rapprochement entre des pays arabes et Israël qui ont été jusqu'à l'établissement de relations diplomatiques et à un degré plus marqué encore par des contacts directs et répétés entre Palestiniens et Israéliens. Ces contacts directs n'ont pas débouché sur l'édification attendue par le monde entier, et à plus forte raison par les peuples arabes, d'un Etat palestinien indépendant. L'élan guerrier a primé sur le langage de la paix.
Pour autant, le scénario d'une nouvelle conflagration dont les armées arabes seraient parties prenantes paraît peu vraisemblable aujourd'hui. Ce n'est plus une perspective productrice pour des pays arabes qui ont sous les yeux l'exemple irakien. Une riposte arabe de grande envergure paraît inenvisageable aujourd'hui. Les Etats arabes, et c'est le moins qu'ils puissent faire, en resteront à des condamnations de principe. Les Etats-Unis, pour préserver Israël, n'admettront pas l'affirmation d'une puissance militaire équivalente dans la région, et d'autant moins encore une coalition de puissances. L'embrasement, s'il est à craindre, pourrait être le fait que d'une armée israélienne suréquipée et qui s'arroge le droit de frapper où elle veut, assurée de n'essuyer aucun contre-feu.
Le bombardement de Beyrouth et du Sud-Liban témoigne d'une surenchère guerrière qui ne se connaît pas de limites. Car Israël pourrait vouloir frapper aussi la Syrie, et n'importe quel autre pays jugé hostile. Déjà le Liban, dont l'aéroport international est détruit, a été coupé du reste du monde. C'est peut-être le début d'un processus d'escalade aux conséquences incalculables.


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