Le peintre Vasco Gasquet nous a quittés il y a quelques jours. L'Algérie perd un ami de longue date, présent à ses côtés au moment de la Guerre d'Indépendance. Il est, parmi les artistes français, l'un des premiers à s'être insurgé contre la guerre coloniale. Avec Fusillades (d'après Goya), il réalise l'un des tout premiers témoignages contre la Guerre d'Algérie, dès 1955. C'est une représentation à peine figurative, inspirée par le Tres de mayo du peintre espagnol Goya. Gasquet s'attache alors à montrer l'inégalité des combats d'une véritable guerre menée contre un peuple. Il est aussi l'un des premiers à avoir évoqué la torture érigée en avec une œuvre, La question, qu'il offrit par la suite à l'Algérie (Musée des Beaux-arts d'Alger). Acquis très tôt à l'idée de l'indépendance de l'Algérie, il fréquente assidument le poète Jean Senac dont il a laissé des portraits saisissants et qui sera le témoin de son mariage avec Elisabeth de Meyenbourg. Bien avant d'être honoré de la distinction de Chevalier des Arts et des Lettres, Vasco, fils d'immigré espagnol, acquis aux idées internationalistes, fut surtout un héritier moderne du chevalier Don Quichotte de la Manche. Pour lui, l'art fut un véritable engagement personnel, depuis son opposition à la guerre coloniale jusqu'à la fin de sa vie. Artiste bouillonnant, il est l'un des principaux animateurs de l'atelier d'affiches des Beaux-arts de Paris en Mai 68. Plus de 500 affiches y sont tirées pour couvrir les murs de Paris. Elles demeurent un véritable miroir de cette période. (Voir Vasco Gasquet 500 affiches de mai 68, Bruxelles, éditions Aden, 2007). Dans la décennie qui suit, il mène une vie trépidante, fasciné par la vitesse, le mouvement, les autres arts pour lesquels il travaille passionnément : le théâtre, la musique. Attiré par l'art vivant, Gasquet élabore des Light shows, et parcourt l'Europe et le Maghreb dans son camion à bulle, servant à projeter les séquences lumineuses, accompagnées de musique. Impliqué dans l'art éphémère, il crée aussi des murs d'images, ou encore anime les premiers festivals de Tabarka (Tunisie) et de Sidi-Ferruch (Algérie). « C'est la dissolution absolue du réel tangible de l'œuvre. Le geste remplace la trace », écrit son épouse Elisabeth Gasquet. Néanmoins, dans les dernières années, il était revenu vers la peinture avec l'un de ses thèmes de prédilection Ubu Roi. Son aide pour l'exposition « Les artistes internationaux et la Révolution algérienne », tenue au Mama lors de l'évènement « Alger, capitale de la culture arabe », et dont nous avions assuré le commissariat, montrait qu'il était resté fidèle au premier engagement de sa vie. Il y était représenté par une série d'études, réalisées en 1955, pour Fusillades, et avec un portrait de Jean Sénac. »