Contrairement à certains pays du Maghreb, la presse hebdomadaire ou mensuelle a du mal à se trouver un lectorat pérenne. Comment pouvez-vous expliquer cela ? En fait, le problème concerne tous les titres, qu'ils soient quotidiens, hebdomadaires ou mensuels. Nous sommes un des seuls pays où les coûts de fabrication sont aussi élevés et un des seuls pays où la distribution est complètement désorganisée. Et enfin, il y a la question du contenu et des relations avec les acteurs et les annonceurs. Dans les autres pays, les acteurs veulent se faire connaître et ont donc un plan de communication suivant les objectifs qu'ils s'assignent. En Algérie, il y a comme une rupture de confiance entre les acteurs économiques et autres, les services de l'Etat et la presse. Ce manque de confiance est l'une des raisons de l'absence de contenus qui puissent intéresser un lecteur déjà volatile. Il ne serait pas inintéressant que les professionnels des médias s'intéressent à l'organisation de la profession en revendiquant et en proposant notamment des structures de gestion du flux publicitaire, de justification de la diffusion et de la distribution. Ce serait bien le diable si, grâce à ces instruments qui fonctionnent ailleurs, des fenêtres de tir ne s'ouvraient pas pour une presse hebdomadaire, mensuelle, bref périodique. Vous dirigez depuis peu un magasine économique, l'Eco. Selon vous, la presse spécialisée en général et économique en particulier a-t-elle de l'avenir en Algérie ? Evidemment ! Sinon je ne me serais pas lancé dans cette aventure. Nous commençons à voir fleurir quelques expériences qui semblent pérennes. Cela dit, la demande pour une presse spécialisée existe. Il s'agit maintenant pour ceux qui sont chargés de la réaliser d'être en conformité avec la demande et de réussir le pari de la qualité. Quelles conditions faudrait-il réunir, d'après vous, pour permettre une réelle émergence d'une presse spécialisée en Algérie ? La première condition est la qualité, celle du support et celle du contenu. La seconde condition est liée à l'amélioration de la distribution de la presse en général. La troisième réside dans le rapport des éventuels annonceurs avec les supports que nous sommes. Il s'agit de sortir de la relation : « je dis du bien de toi, tu me donnes de la pub ou sinon je dis du mal de toi parce que je n'ai pas eu de publicité de ta part. » Aucun journal et aucune revue ne peuvent se passer de publicité. Mais la relation doit être autre que celle qui existe actuellement. La publicité n'est pas un moyen d'avoir bonne presse mais un vecteur pour faire connaître un produit ou un service à un public cible. A quelles difficultés faites-vous face le plus ? Aux mêmes difficultés que la presse quotidienne, un peu plus accentuées du fait de la jeunesse de notre titre. L'accès à la source d'information pose et, je pense, posera toujours problème, particulièrement au niveau des entreprises. La transparence dans le monde économique algérien n'est pas encore de mise. Le poids de l'informel est tel que les entreprises hésitent à communiquer sur leurs chiffres réels. Seconde difficulté, la distribution. La troisième difficulté est liée à la qualité de la formation de ceux qui interviennent dans la fabrication de la revue. Les meilleurs sont très chers et donc par conséquent hors de prix pour une revue qui débute. Dernière difficulté, le rapport entre annonceurs et supports. Dans la majorité des cas, il s'agit soit d'une vente concomitante, soit d'un chantage. Sur ces rapports « commerciaux », il est nécessaire de trouver une sorte d'autorité qui puisse clarifier les relations annonceurs-presse.