C'est Khalida Toumi, ministre de la Culture, qui a mis le holà en ordonnant, avant-hier, lors de l'inauguration d'un centre audiovisuel et du site web d'«Alger, Capitale de la culture arabe 2007», la fermeture d'un cabaret situé au-dessus du centre audiovisuel de Riad El Feth. «J'ordonne la fermeture d'autorité de ce cabaret de caniveau, situé au-dessus du centre audiovisuel», a indiqué Mme Toumi. Et d'expliquer, qu'à l'origine, ce cabaret «caniveau», comme elle a tenu à le préciser, était «un théâtre pour enfant» et faisait aussi office de «café-théâtre» où s'étaient produits plusieurs artistes algériens, notamment Mohamed Fellag et Hakim Dekkar. Cet espace, regrette Mme Toumi, a été «détourné de sa vocation pour être transformé en cabaret» et ce «en violation des textes régissant cet espace à vocation culturelle». Selon la ministre de la Culture, le local a été loué à un gérant privé qui en a fait un cabaret. Ce même gérant s'est même arrogé le droit d'aménager des sanitaires, malgré le refus de l'administration de l'Office Riad El Feth à l'époque, causant ainsi des inondations à l'intérieur du centre audiovisuel, a-t-elle ajouté. En plus de la destruction de la culture, avoue-t-elle, «il y a destruction des biens de l'Etat» d'autant plus que des artistes qui se sont produits à la salle Ibn Zeydoun, mitoyenne avec le cabaret ainsi que les participants au festival de la musique andalouse «ont souffert du bruit et des agressions résultant de l'implantation de ce cabaret à cet endroit». Contactée, la gérante de cet établissement dira qu'elle y exerce depuis 3 ans déjà et que cette activité de dîner dansant existait depuis une dizaine d'années. «Il n'y a pas que mon établissement, il en existe près de 26 à Riad El Feth et je me demande pour quelle raison je suis la seule concernée par cette fermeture.» Notre interlocutrice s'interroge également sur les raisons qui ont poussé la tutelle à réagir aujourd'hui alors que cette activité s'exerçait voilà une dizaine d'années «sans le moindre problème». «Pourquoi les autorités ne se sont pas manifestées lorsqu'il y a eu changement de vocation», s'interroge-t-elle. Et de préciser qu'elle est en possession du registre du commerce, de l'autorisation de spectacle et de celle de débit de boissons et qu'elle est à jour concernant le loyer et les impôts. «J'ai déboursé près de 800 millions de centimes pour les travaux de réparation», affirme-t-elle. Il y a lieu de préciser que lors d'une enquête effectuée par El Watan en avril de l'année passée, nous avons tiré la sonnette d'alarme quant à la destruction programmée d'un haut lieu de culture. Inauguré en 1982, Ryad El Feth offrait un visage d'une superbe structure culturelle. Il était le lieu de prédilection des artistes, artisans, plasticiens, musiciens et autres amoureux du livre et devait ressembler au centre Beaubourg (ou Pompidou), à Paris.Hormis les espaces culturels, Ryad El Feth hébergeait quelques restaurants au cadre agréable où l'on servait de la bonne cuisine à la sauce orientale et occidentale. On y venait en famille. En mars 2006, les lieux se sont métamorphosés, laissant place à une clochardisation tous azimuts. Assassinat prémédité de la culture algérienne. D'autres «espaces» ont vu le jour, où, à la nuit tombée, il est déconseillé de s'y aventurer. Aux agressions, devenues monnaie courante, s'ajoute la prostitution qui se pratique dans les nombreux night clubs qui activent au niveau du… centre des arts et au Bois des arcades, deux sites qui font partie de l'Office de Riad El Feth (OREF), institution dépendant du ministère de la Culture. La montée au créneau de Mme Toumi augure des jours meilleurs pour notre culture en général et l'Office Riad El Feth en particulier, qui devra, si la ministre poursuit son opération de nettoyage, redonner à Riad El Feth son lustre d'antan afin qu'il redevienne un lieu familial, culturel et artistique. C'est sa vocation initiale.